Bienvenue à l'ILEE, l'Institut de la Vie, de la Terre et de l'Environnement de l'Université de Namur, qui s'engage à répondre aux questions environnementales urgentes.
Nous réunissons une équipe d'experts issus de divers horizons et disciplines pour travailler en collaboration en utilisant des technologies innovantes et des méthodes scientifiques rigoureuses afin d'apporter des contributions significatives au domaine des sciences de l'environnement.
L'institut ILEE est membre d'Alternet, le réseau européen de recherche sur les écosystèmes.
Notre institut se consacre à l'avancement de la recherche fondamentale et appliquée en vue d'une meilleure compréhension des processus sous-jacents qui régulent la vie sur terre, à la caractérisation des pressions anthropogéniques sur l'environnement et vice versa, et à la recherche d'alternatives durables pour gérer les ressources naturelles, réduire la pollution, conserver et restaurer la biodiversité.

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Le Département de biologie de l’UNamur contribue à la sauvegarde d’un troupeau de mouflons grâce à son expertise en génétique
Le Département de biologie de l’UNamur contribue à la sauvegarde d’un troupeau de mouflons grâce à son expertise en génétique
Une recherche peu banale a récemment mobilisé des équipes du Département de biologie de l’UNamur. Des analyses génétiques réalisées par l’Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive (URBE) ont en effet pu confirmer le statut de protection d’un troupeau de mouflons sauvages installé à Gesves, et ainsi souligner l’importance de leur sauvetage.

Ces derniers mois, la commune de Gesves, en province de Namur, était confrontée à la présence d’un troupeau de mouflons, des moutons sauvages reconnaissables à leurs impressionnantes cornes en spirales. À l’origine de celui-ci : un mâle et une femelle probablement échappés d’une chasse privée, qui se sont installés et reproduits dans les prairies de cette commune rurale en 2019, jusqu’à former un véritable troupeau de 17 individus en 2024.
Si ces ovins ont gagné l’affection des habitants, les agriculteurs locaux déploraient quant à eux les dommages causés à leurs cultures. Leurs plaintes ont abouti en août 2024 à une autorisation de destruction émanant du Département Nature et Forêt (DNF). Plusieurs individus ont également été abattus pendant la période de chasse.

Une opération de sauvetage complexe
Touchés par le sort réservé à ces animaux, une poignée de riverains a mené depuis le mois de janvier une véritable opération de sauvetage des sept mouflons encore présents sur les prairies. La manœuvre s’annonçait pour le moins complexe : il fallait, d’une part, réunir les autorisations officielles nécessaires à la capture et au transport des mouflons dans un lieu adapté et, d’autre part, mettre en place une infrastructure pour les capturer.
Un enclos muni d’une caméra de surveillance et d’un système de fermeture automatisé a alors été installé par une entreprise spécialisée. Après des mois d’un travail d’approche patient et millimétré, les mouflons ont pu être capturés en douceur le 24 mai dernier et transférés au Domaine des Grottes de Han, prêt à les accueillir.

Origine des mouflons : l’ADN à la rescousse
En parallèle de cette initiative, les riverains mobilisés – parmi lesquels Nathalie Kirschvink, vétérinaire et professeure à la Faculté de médecine de l’UNamur – ont sollicité l’expertise des laboratoires de l’Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive (URBE) de l’UNamur pour éclaircir une question déterminante : l’origine des mouflons. En effet, dans nos régions, les mouflons sont considérés comme du gibier et donc chassables, tandis que les mouflons issus de certaines lignées bénéficient d’une protection.
Nathalie Kirschvink a donc confié des échantillons frais composés de poils et d’excréments à Alice Dennis, professeure et chercheuse à l’URBE. Le séquençage de l’ADN contenu dans ces échantillons a permis à Alice Dennis et au technicien Jérôme Lambert d’identifier des liens de parenté entre les mouflons de Gesves et ceux issus d’une lignée corse, dont le génome avait déjà été décrit dans la littérature scientifique.

Cette identification repose sur la phylogénie, une méthode utilisée dans les sciences du vivant permettant de reconstituer au travers d’un arbre phylogénétique les relations évolutives entre des espèces et ainsi retracer leurs origines et leurs liens de parenté.
De la cellule aux écosystèmes : plonger dans l’infiniment petit pour protéger le vivant
Cette expertise est au cœur des recherches de l’URBE, qui utilise les outils de l’écologie moléculaire pour étudier aussi bien la physiologie d’organismes (comme les escargots pour Alice Dennis) que leurs interactions avec leur environnement. La méthodologie utilisée peut s’appliquer à des cas très concrets et locaux, comme celui des mouflons de Gesves mais, plus largement, servir à une meilleure compréhension de la diversité génétique entre espèces dans une optique de sauvegarde de la biodiversité.

L’URBE s’oriente de plus en plus vers l’écologie moléculaire, une discipline qui explore, via la génétique, la capacité d’adaptation des espèces aux changements environnementaux. En effet, plus une population est diversifiée au niveau génétique, au mieux elle a la capacité à s’adapter aux perturbations de son environnement. Il s’agit de questionnements essentiels en termes de conservation des espèces, à l’heure où la biodiversité connaît une crise sans précédent.
En savoir plus sur l’Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive

Deux chercheurs en biologie récompensés par le Fonds Adrien Bauchau
Deux chercheurs en biologie récompensés par le Fonds Adrien Bauchau
Le Professeur Eli Thoré et Justine Bélik viennent d’être récompensés par le Fonds Adrien Bauchau (FAB). Créé à la mémoire du fondateur du Département de biologie de l'UNamur, le FAB promeut, depuis 1989, l’excellence de la formation et de la recherche dans le domaine des sciences de la vie.

Les actions régulières du FAB dans le contexte universitaire belge sont l’attribution de bourses, de prix, de subsides, l’organisation d’une chaire, la contribution à l’organisation de colloques, d’écoles doctorales ou de journées d’études. Il collabore avec un réseau de partenaires belges et étrangers : personnes, associations publiques et privées, institutions et entreprises.
Aide financière à un·e jeune académique ou post-doctorat
En concertation avec le Département de biologie de l’Université de Namur, le Fonds Adrien Bauchau a attribué pour la première fois une aide financière d'un montant de 25 000 euros destinée à soutenir un·e jeune professeur·e ou post-doctorat en biologie de l’institution dans les premières étapes de sa carrière professionnelle.
En mai 2025, le Conseil d ‘Administration du FAB a attribué cette aide au Professeur Eli Thoré, académique au sein de l'Unité de Recherche Environnementale et Evolutive (URBE) pour le développement de ses travaux.
Ses travaux portent sur :
- L’étude des effets individuels et interactifs des produits chimiques synthétiques, de la lumière artificielle et de l'augmentation de la température sur les performances et le bien-être des poissons.
- Les impacts écologiques de la pollution pharmaceutique et lumineuse dans les eaux belges et suédoises.
- Les impacts jour-nuit des mélanges de médicaments sur l'anguille européenne menacée.
Sur la photo : Eli Thoré et André Van den Bogaert, Président du FAB.

Bourse Bauchau Congrès
La Bourse 2025 a été attribuée à Justine Bélik, dont le promoteur de thèse est le Professeur Frédéric Silvestre pour sa participation au 3e congrès international EPIMAR 2025 "Epigenetics in marine and aquatic research", organisé fin mai 2025 à Barcelone, en Espagne.
La bourse est destinée à un·e jeune chercheur·e pour permettre sa participation à un congrès à l’étranger. Le montant accordé est fonction du coût de cette participation ; il peut atteindre 750€.
Au cours d’un séminaire organisé par l’Institut ILEE en juin 2025, Justine Bélik a également présenté ses recherches en cours sur le vieillissement épigénétique du Kryptolebias marmoratus, une espèce de vertébrés caractérisée par l’autofécondation.
Légende de l’image : Justine Bélik, Séminaire ILEE

L’UNamur et les recherches en biologie
Le Département de biologie mène une recherche scientifique internationale de pointe. Celle-ci se répartit entre 5 unités de recherche abordant des thématiques variées : la biologie cellulaire (URBC), la microbiologie (URBM) ou encore la méthodologie et la didactique (UMDB). Les deux chercheurs récompensés font partie de l’Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive (URBE) et sont membres de l'Institute of Life, Earth and Environment (ILEE), qui s'engage à répondre aux questions environnementales urgentes.
Le Professeur Frédéric Silvestre, promoteur de thèse de Justine Bélik, dirige le Laboratoire de Physiologie Evolutive et Adaptative (LEAP). Ce laboratoire étudie les impacts des changements environnementaux sur les organismes aquatiques à différents niveaux, sous l’angle de la physiologie intégrative.
Le Professeur Eli Thoré dirige le Laboratoire de Biodynamique Adaptative (LAB). Il utilise une approche intégrative pour comprendre comment les animaux réagissent aux changements environnementaux, en particulier ceux induits par l’activité humaine dans l’espace et dans le temps.
Les études en biologie à l’UNamur
Le Département de biologie de l’UNamur vous offre une formation scientifique de pointe, moderne, diversifiée, et ouverte à l’international. De la cellule à l’écosystème, la biologie étudie toutes les formes de vie. Elle est essentielle pour comprendre les questions sociétales complexes qui touchent à l’environnement, à la santé et au développement durable.

Une première en Belgique : une chercheuse de l’UNamur révèle l’histoire oubliée des loups wallons grâce à l’ADN ancien
Une première en Belgique : une chercheuse de l’UNamur révèle l’histoire oubliée des loups wallons grâce à l’ADN ancien
Entre 2020 et 2025, la chercheuse Julie Duchêne a mené dans le cadre de sa thèse de doctorat en histoire, une enquête inédite mêlant histoire et biologie pour retracer la cohabitation entre humains et loups en Wallonie et au Luxembourg, du 18e au début du 20e siècle. Grâce à une approche interdisciplinaire novatrice, incluant l’analyse ADN de spécimens naturalisés du 19e siècle, son travail éclaire les mécanismes ayant conduit à l’extinction locale de l’espèce. Un travail de recherche rendu possible grâce au soutien de nombreux partenaires scientifiques et culturels.

Dans sa thèse de doctorat, Julie Duchêne (Docteure en Histoire UNamur/FNRS-FRESH) a sorti de l’ombre l’histoire inexplorée de la relation entre les humains et les loups dans les territoires wallons et luxembourgeois durant l’époque charnière qui y a vu l’extinction de l’espèce (18e-début du 20e siècle).
Les enjeux de cette recherche ?
- Comprendre la complexité de cette coexistence dans nos régions,
- Identifier l’influence des activités humaines sur la vie des loups et celle des loups sur les activités humaines,
- Décrypter les mécanismes ayant mené à l’extinction de Canis lupus.
Pour ce faire, la chercheuse a déployé une méthodologie pluridisciplinaire pionnière en Belgique, combinant d’une part analyses historiques et documentaires, et d’autre part analyses morphologiques et ADN des loups naturalisés du 19e siècle conservés au sein d’une douzaines d’institutions, musées et lieux partenaires en Wallonie. Grâce à la collaboration entre le laboratoire E-BIOM et l’Université de Namur, 13 spécimens ont ainsi été étudiés selon un protocole rigoureux, respectueux de l’intégrité des pièces historiques.
Si l’ADN ancien est souvent dégradé par le temps, les conditions de conservation ou les produits utilisés lors de la naturalisation, 9 échantillons sur 13 ont donné des résultats.

Les principaux résultats de cette analyse :
- Espèce confirmée : Tous les spécimens analysés appartiennent à l’espèce Canis lupus lupus, écartant l’hypothèse de chiens ou d’hybrides.
- Lien de parenté identifié : Deux loups, dont l’un conservé par la famille de Bonhome à Mozet, présentent un lien de parenté avéré.
- Haplotypes dominants : La majorité des loups appartiennent aux haplotypes H4 et H8, issus d’une métapopulation historiquement présente de l’ouest de la France à l’Allemagne.
- Découverte d’un haplotype disparu : Le loup de Habay, conservé par la famille de Beaulieu, présente un profil génétique unique, probablement issu d’une population aujourd’hui éteinte.
- Diversité génétique passée plus élevée : Les loups des 18e et 19e siècles montrent une plus grande diversité génétique que les populations actuelles.
- Wallonie, carrefour historique : Déjà à l’époque, la région se situait à la croisée de deux grandes voies de dispersion lupine : l’une venant de France, l’autre d’Allemagne.

Ces découvertes soulignent la richesse génétique passée des loups en Europe et la position stratégique de la Wallonie, déjà carrefour de dispersion au 19e siècle. Une situation qui fait écho à la recolonisation actuelle du territoire par les lignées germano-polonaise et italo-alpine
Cette étude met en lumière l’importance des collections patrimoniales pour mieux comprendre l’histoire évolutive des espèces et les enjeux contemporains de conservation.
Envie d'en savoir plus ?
Découvrez l’ensemble des résultats de cette étude et le projet « Loup qui es-tu ? »
Brochure explicative du projet "Loup, qui es-tu ?"
Pour aller plus loin …
Déconstruire les idées reçues sur le loup pour un débat mieux informé
L’analyse historique et scientifique réalisée par Julie Duchêne permet aussi de nuancer certaines idées reçues sur le loup, souvent relayées dans les débats actuels.
- Les attaques sur l’être humain ont existé, mais elles restent marginales et à relativiser. Les plaintes concernaient surtout les pertes de bétail (moutons, vaches, chevaux…).
- Le loup ne vit pas que dans la forêt. Historiquement, il fréquentait aussi champs, routes, étangs ou landes. Sa présence dépend de nombreux facteurs, pas d’un habitat unique.
- Les confrontations ne sont pas unilatérales. Elles résultent aussi de l’expansion humaine dans les milieux naturels, et non uniquement d’incursions du loup.
- Les populations ne cherchaient pas à exterminer l’espèce. Elles visaient une régulation, intégrant les nuisances lupines comme d’autres aléas naturels.
- Le loup joue un rôle écologique positif, en régulant les populations de grands herbivores, ce qui favorise la régénération des forêts.
- L’extinction du loup n’est pas due uniquement aux politiques d’éradication. Elle résulte d’un ensemble de facteurs, dont la pression croissante de l’être humain sur les milieux naturels.
Une étude qui se prolonge en exposition
La recherche de Julie Duchêne a aussi servi à mettre en place l’exposition « Même pas peur ! Une évolution de l'image du loup à travers les siècles », élaborée par les étudiants et étudiantes de troisième année de bachelier en histoire dans le cadre du cours de Projet culturel. Une exposition qui fait notamment halte à :
- De mai à début juin 2025 : séminaire de Floreffe
- De juin à septembre 2025 : Pairi Daiza
- D’octobre 2025 à mai 2026 : Musée gaumais
A propos de Julie Duchêne
Julie Duchêne est docteure en Histoire de l’UNamur, spécialiste en histoire environnementale et en histoire appliquée (Public History). Boursière FNRS-FRESH, elle a défendu au printemps 2025 sa thèse de doctorat intitulée « Les loups, de nuisibles à invisibles. Le rôle des politiques de lutte dans la disparition des loups des territoires wallon et luxembourgeois (18e-20e siècles), menée sous la direction de la professeure Isabelle Parmentier (directrice du Pôle de l'histoire environnementale, institut ILEE).

Une nouvelle étude révèle que les anxiolytiques perturbent la migration des saumons
Une nouvelle étude révèle que les anxiolytiques perturbent la migration des saumons
Une équipe de recherche internationale dirigée par l'Université suédoise des sciences agricoles a découvert comment la pollution pharmaceutique modifie le comportement et les schémas de migration du saumon de l'Atlantique. Le professeur Eli Thoré, du Département de biologie et de l'institut de recherche ILEE de l'Université de Namur, a contribué à cette étude de terrain inédite, qui vient d'être publiée dans « Science ».

Crédit image | Jörgen Wiklund
Contrairement aux études précédentes menées en laboratoire, cette expérience à grande échelle s'est déroulée dans une rivière suédoise et a combiné une exposition pharmaceutique réaliste avec une télémétrie de pointe pour suivre le comportement de 279 saumons juvéniles (smolts) au cours de leur migration vers la mer. Les saumons ont été exposés soit à l'anxiolytique clobazam (une benzodiazépine), soit à un analgésique courant, soit aux deux, soit à aucun des deux. Les médicaments ont été administrés au moyen d'implants à libération lente, à des doses reproduisant les concentrations mesurées précédemment chez les poissons sauvages des rivières polluées.
Les chercheurs ont constaté que les saumons exposés au clobazam franchissaient les barrières migratoires de deux à huit fois plus vite que les autres groupes. Étonnamment, une proportion plus élevée - plus du double - de ces poissons a atteint la mer en vie. Mais s'agit-il d'une bonne nouvelle ?
« À première vue, il peut s'agir d'un effet positif », déclare le professeur Eli Thoré, qui a contribué à l'analyse des données, à l'interprétation et à la publication de l'étude. « Mais de tels changements de comportement peuvent entraîner des coûts cachés. En se déplaçant plus rapidement, les poissons peuvent prendre plus de risques ou utiliser l'énergie de manière moins efficace, ce qui pourrait compromettre leurs chances de survivre au voyage de retour pour frayer. Sans parler des répercussions que cela pourrait avoir sur d'autres espèces et sur l'écosystème dans son ensemble ».
Des expériences complémentaires en laboratoire ont montré que les saumons exposés au clobazam se comportaient moins socialement et ne parvenaient pas à se regrouper étroitement lorsqu'ils étaient confrontés à un brochet prédateur. La formation de bancs est une stratégie clé de lutte contre les prédateurs chez les poissons, et la perte de ce type de comportement peut accroître la vulnérabilité à l'état sauvage.

C'est la première fois que les effets comportementaux de médicaments psychiatriques sont testés à grande échelle sur des poissons migrateurs dans leur habitat naturel. Le professeur Thoré a participé au projet lors de ses recherches postdoctorales à l'Université suédoise des sciences agricoles (SLU) et reste activement impliqué dans la collaboration aujourd'hui.
« Ce projet s'inscrit dans le cadre d'un partenariat à long terme entre l'UNamur et la SLU », explique-t-il. « Nous travaillons ensemble sur plusieurs projets afin de mieux comprendre comment les polluants pharmaceutiques affectent le comportement et l'écologie des animaux sauvages, et comment nous pouvons atténuer ces effets. C'est une collaboration productive, et je la vois évoluer vers un lien structurel à long terme entre nos institutions ».
Un problème mondial avec une pertinence locale
Des résidus pharmaceutiques tels que le clobazam sont fréquemment détectés dans les rivières européennes, y compris dans les cours d'eau belges. Une étude mondiale réalisée en 2022 a révélé qu'une rivière sur quatre dans le monde contient des concentrations pharmaceutiques considérées comme dangereuses pour la vie aquatique. Les rivières de Bruxelles ont été classées parmi les 20 % les plus contaminées.
« Les médicaments comme le clobazam sont conçus pour agir sur le cerveau à faible dose, et il en va de même lorsqu'ils sont absorbés par les poissons », explique le professeur Thoré. «n Nos résultats montrent que même de très faibles concentrations, pertinentes pour l'environnement, peuvent modifier la migration et le comportement d'une espèce importante sur le plan écologique, économique et culturel, comme le saumon. »
Il ajoute : « Le saumon vit également en Belgique, notamment dans la Meuse. Dans le cadre du projet ORION, une initiative Interreg lancée il y a quelques mois seulement et réunissant des partenaires de Wallonie, de Flandre et de France, nous utilisons maintenant le saumon comme espèce sentinelle pour étudier l'influence des polluants sur la santé de la Meuse et de ses habitants. Ce que nous avons observé en Suède est tout à fait pertinent chez nous ».

Comme il l'a expliqué dans une interview accordée à De Standaard :

Cette recherche souligne la nécessité d'une réglementation appropriée des émissions pharmaceutiques et de technologies efficaces de traitement des eaux usées, et pourrait encourager le développement de médicaments plus écologiques et plus respectueux de l'environnement.
Mini-bio - Prof. Eli Thoré
Eli Thoré est professeur au Département de biologie et expert en comportement animal et en recherche sur la pollution environnementale à l'Université de Namur (Belgique), où il dirige le Laboratoire de Biodynamique Adaptative (LAB), qui fait partie de l'Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive (URBE). Il est également membre de l'Institut Life, Earth and Environment (ILEE). Son équipe adopte une approche intégrative pour comprendre comment les animaux réagissent aux changements environnementaux, en particulier ceux induits par l'activité humaine, y compris la pollution pharmaceutique. En se concentrant sur le comportement animal ainsi que sur ses mécanismes sous-jacents et ses conséquences écologiques plus larges - et en reliant ces différentes échelles - son équipe s'efforce de faire progresser les connaissances scientifiques et de contribuer à des écosystèmes prospères qui peuvent catalyser le développement durable.
Lire l'article scientifique publié dans Science: Pharmaceutical pollution influences river-to-sea migration in Atlantic salmon (Salmo salar)

Le Département de biologie de l’UNamur contribue à la sauvegarde d’un troupeau de mouflons grâce à son expertise en génétique
Le Département de biologie de l’UNamur contribue à la sauvegarde d’un troupeau de mouflons grâce à son expertise en génétique
Une recherche peu banale a récemment mobilisé des équipes du Département de biologie de l’UNamur. Des analyses génétiques réalisées par l’Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive (URBE) ont en effet pu confirmer le statut de protection d’un troupeau de mouflons sauvages installé à Gesves, et ainsi souligner l’importance de leur sauvetage.

Ces derniers mois, la commune de Gesves, en province de Namur, était confrontée à la présence d’un troupeau de mouflons, des moutons sauvages reconnaissables à leurs impressionnantes cornes en spirales. À l’origine de celui-ci : un mâle et une femelle probablement échappés d’une chasse privée, qui se sont installés et reproduits dans les prairies de cette commune rurale en 2019, jusqu’à former un véritable troupeau de 17 individus en 2024.
Si ces ovins ont gagné l’affection des habitants, les agriculteurs locaux déploraient quant à eux les dommages causés à leurs cultures. Leurs plaintes ont abouti en août 2024 à une autorisation de destruction émanant du Département Nature et Forêt (DNF). Plusieurs individus ont également été abattus pendant la période de chasse.

Une opération de sauvetage complexe
Touchés par le sort réservé à ces animaux, une poignée de riverains a mené depuis le mois de janvier une véritable opération de sauvetage des sept mouflons encore présents sur les prairies. La manœuvre s’annonçait pour le moins complexe : il fallait, d’une part, réunir les autorisations officielles nécessaires à la capture et au transport des mouflons dans un lieu adapté et, d’autre part, mettre en place une infrastructure pour les capturer.
Un enclos muni d’une caméra de surveillance et d’un système de fermeture automatisé a alors été installé par une entreprise spécialisée. Après des mois d’un travail d’approche patient et millimétré, les mouflons ont pu être capturés en douceur le 24 mai dernier et transférés au Domaine des Grottes de Han, prêt à les accueillir.

Origine des mouflons : l’ADN à la rescousse
En parallèle de cette initiative, les riverains mobilisés – parmi lesquels Nathalie Kirschvink, vétérinaire et professeure à la Faculté de médecine de l’UNamur – ont sollicité l’expertise des laboratoires de l’Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive (URBE) de l’UNamur pour éclaircir une question déterminante : l’origine des mouflons. En effet, dans nos régions, les mouflons sont considérés comme du gibier et donc chassables, tandis que les mouflons issus de certaines lignées bénéficient d’une protection.
Nathalie Kirschvink a donc confié des échantillons frais composés de poils et d’excréments à Alice Dennis, professeure et chercheuse à l’URBE. Le séquençage de l’ADN contenu dans ces échantillons a permis à Alice Dennis et au technicien Jérôme Lambert d’identifier des liens de parenté entre les mouflons de Gesves et ceux issus d’une lignée corse, dont le génome avait déjà été décrit dans la littérature scientifique.

Cette identification repose sur la phylogénie, une méthode utilisée dans les sciences du vivant permettant de reconstituer au travers d’un arbre phylogénétique les relations évolutives entre des espèces et ainsi retracer leurs origines et leurs liens de parenté.
De la cellule aux écosystèmes : plonger dans l’infiniment petit pour protéger le vivant
Cette expertise est au cœur des recherches de l’URBE, qui utilise les outils de l’écologie moléculaire pour étudier aussi bien la physiologie d’organismes (comme les escargots pour Alice Dennis) que leurs interactions avec leur environnement. La méthodologie utilisée peut s’appliquer à des cas très concrets et locaux, comme celui des mouflons de Gesves mais, plus largement, servir à une meilleure compréhension de la diversité génétique entre espèces dans une optique de sauvegarde de la biodiversité.

L’URBE s’oriente de plus en plus vers l’écologie moléculaire, une discipline qui explore, via la génétique, la capacité d’adaptation des espèces aux changements environnementaux. En effet, plus une population est diversifiée au niveau génétique, au mieux elle a la capacité à s’adapter aux perturbations de son environnement. Il s’agit de questionnements essentiels en termes de conservation des espèces, à l’heure où la biodiversité connaît une crise sans précédent.
En savoir plus sur l’Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive

Deux chercheurs en biologie récompensés par le Fonds Adrien Bauchau
Deux chercheurs en biologie récompensés par le Fonds Adrien Bauchau
Le Professeur Eli Thoré et Justine Bélik viennent d’être récompensés par le Fonds Adrien Bauchau (FAB). Créé à la mémoire du fondateur du Département de biologie de l'UNamur, le FAB promeut, depuis 1989, l’excellence de la formation et de la recherche dans le domaine des sciences de la vie.

Les actions régulières du FAB dans le contexte universitaire belge sont l’attribution de bourses, de prix, de subsides, l’organisation d’une chaire, la contribution à l’organisation de colloques, d’écoles doctorales ou de journées d’études. Il collabore avec un réseau de partenaires belges et étrangers : personnes, associations publiques et privées, institutions et entreprises.
Aide financière à un·e jeune académique ou post-doctorat
En concertation avec le Département de biologie de l’Université de Namur, le Fonds Adrien Bauchau a attribué pour la première fois une aide financière d'un montant de 25 000 euros destinée à soutenir un·e jeune professeur·e ou post-doctorat en biologie de l’institution dans les premières étapes de sa carrière professionnelle.
En mai 2025, le Conseil d ‘Administration du FAB a attribué cette aide au Professeur Eli Thoré, académique au sein de l'Unité de Recherche Environnementale et Evolutive (URBE) pour le développement de ses travaux.
Ses travaux portent sur :
- L’étude des effets individuels et interactifs des produits chimiques synthétiques, de la lumière artificielle et de l'augmentation de la température sur les performances et le bien-être des poissons.
- Les impacts écologiques de la pollution pharmaceutique et lumineuse dans les eaux belges et suédoises.
- Les impacts jour-nuit des mélanges de médicaments sur l'anguille européenne menacée.
Sur la photo : Eli Thoré et André Van den Bogaert, Président du FAB.

Bourse Bauchau Congrès
La Bourse 2025 a été attribuée à Justine Bélik, dont le promoteur de thèse est le Professeur Frédéric Silvestre pour sa participation au 3e congrès international EPIMAR 2025 "Epigenetics in marine and aquatic research", organisé fin mai 2025 à Barcelone, en Espagne.
La bourse est destinée à un·e jeune chercheur·e pour permettre sa participation à un congrès à l’étranger. Le montant accordé est fonction du coût de cette participation ; il peut atteindre 750€.
Au cours d’un séminaire organisé par l’Institut ILEE en juin 2025, Justine Bélik a également présenté ses recherches en cours sur le vieillissement épigénétique du Kryptolebias marmoratus, une espèce de vertébrés caractérisée par l’autofécondation.
Légende de l’image : Justine Bélik, Séminaire ILEE

L’UNamur et les recherches en biologie
Le Département de biologie mène une recherche scientifique internationale de pointe. Celle-ci se répartit entre 5 unités de recherche abordant des thématiques variées : la biologie cellulaire (URBC), la microbiologie (URBM) ou encore la méthodologie et la didactique (UMDB). Les deux chercheurs récompensés font partie de l’Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive (URBE) et sont membres de l'Institute of Life, Earth and Environment (ILEE), qui s'engage à répondre aux questions environnementales urgentes.
Le Professeur Frédéric Silvestre, promoteur de thèse de Justine Bélik, dirige le Laboratoire de Physiologie Evolutive et Adaptative (LEAP). Ce laboratoire étudie les impacts des changements environnementaux sur les organismes aquatiques à différents niveaux, sous l’angle de la physiologie intégrative.
Le Professeur Eli Thoré dirige le Laboratoire de Biodynamique Adaptative (LAB). Il utilise une approche intégrative pour comprendre comment les animaux réagissent aux changements environnementaux, en particulier ceux induits par l’activité humaine dans l’espace et dans le temps.
Les études en biologie à l’UNamur
Le Département de biologie de l’UNamur vous offre une formation scientifique de pointe, moderne, diversifiée, et ouverte à l’international. De la cellule à l’écosystème, la biologie étudie toutes les formes de vie. Elle est essentielle pour comprendre les questions sociétales complexes qui touchent à l’environnement, à la santé et au développement durable.

Une première en Belgique : une chercheuse de l’UNamur révèle l’histoire oubliée des loups wallons grâce à l’ADN ancien
Une première en Belgique : une chercheuse de l’UNamur révèle l’histoire oubliée des loups wallons grâce à l’ADN ancien
Entre 2020 et 2025, la chercheuse Julie Duchêne a mené dans le cadre de sa thèse de doctorat en histoire, une enquête inédite mêlant histoire et biologie pour retracer la cohabitation entre humains et loups en Wallonie et au Luxembourg, du 18e au début du 20e siècle. Grâce à une approche interdisciplinaire novatrice, incluant l’analyse ADN de spécimens naturalisés du 19e siècle, son travail éclaire les mécanismes ayant conduit à l’extinction locale de l’espèce. Un travail de recherche rendu possible grâce au soutien de nombreux partenaires scientifiques et culturels.

Dans sa thèse de doctorat, Julie Duchêne (Docteure en Histoire UNamur/FNRS-FRESH) a sorti de l’ombre l’histoire inexplorée de la relation entre les humains et les loups dans les territoires wallons et luxembourgeois durant l’époque charnière qui y a vu l’extinction de l’espèce (18e-début du 20e siècle).
Les enjeux de cette recherche ?
- Comprendre la complexité de cette coexistence dans nos régions,
- Identifier l’influence des activités humaines sur la vie des loups et celle des loups sur les activités humaines,
- Décrypter les mécanismes ayant mené à l’extinction de Canis lupus.
Pour ce faire, la chercheuse a déployé une méthodologie pluridisciplinaire pionnière en Belgique, combinant d’une part analyses historiques et documentaires, et d’autre part analyses morphologiques et ADN des loups naturalisés du 19e siècle conservés au sein d’une douzaines d’institutions, musées et lieux partenaires en Wallonie. Grâce à la collaboration entre le laboratoire E-BIOM et l’Université de Namur, 13 spécimens ont ainsi été étudiés selon un protocole rigoureux, respectueux de l’intégrité des pièces historiques.
Si l’ADN ancien est souvent dégradé par le temps, les conditions de conservation ou les produits utilisés lors de la naturalisation, 9 échantillons sur 13 ont donné des résultats.

Les principaux résultats de cette analyse :
- Espèce confirmée : Tous les spécimens analysés appartiennent à l’espèce Canis lupus lupus, écartant l’hypothèse de chiens ou d’hybrides.
- Lien de parenté identifié : Deux loups, dont l’un conservé par la famille de Bonhome à Mozet, présentent un lien de parenté avéré.
- Haplotypes dominants : La majorité des loups appartiennent aux haplotypes H4 et H8, issus d’une métapopulation historiquement présente de l’ouest de la France à l’Allemagne.
- Découverte d’un haplotype disparu : Le loup de Habay, conservé par la famille de Beaulieu, présente un profil génétique unique, probablement issu d’une population aujourd’hui éteinte.
- Diversité génétique passée plus élevée : Les loups des 18e et 19e siècles montrent une plus grande diversité génétique que les populations actuelles.
- Wallonie, carrefour historique : Déjà à l’époque, la région se situait à la croisée de deux grandes voies de dispersion lupine : l’une venant de France, l’autre d’Allemagne.

Ces découvertes soulignent la richesse génétique passée des loups en Europe et la position stratégique de la Wallonie, déjà carrefour de dispersion au 19e siècle. Une situation qui fait écho à la recolonisation actuelle du territoire par les lignées germano-polonaise et italo-alpine
Cette étude met en lumière l’importance des collections patrimoniales pour mieux comprendre l’histoire évolutive des espèces et les enjeux contemporains de conservation.
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Découvrez l’ensemble des résultats de cette étude et le projet « Loup qui es-tu ? »
Brochure explicative du projet "Loup, qui es-tu ?"
Pour aller plus loin …
Déconstruire les idées reçues sur le loup pour un débat mieux informé
L’analyse historique et scientifique réalisée par Julie Duchêne permet aussi de nuancer certaines idées reçues sur le loup, souvent relayées dans les débats actuels.
- Les attaques sur l’être humain ont existé, mais elles restent marginales et à relativiser. Les plaintes concernaient surtout les pertes de bétail (moutons, vaches, chevaux…).
- Le loup ne vit pas que dans la forêt. Historiquement, il fréquentait aussi champs, routes, étangs ou landes. Sa présence dépend de nombreux facteurs, pas d’un habitat unique.
- Les confrontations ne sont pas unilatérales. Elles résultent aussi de l’expansion humaine dans les milieux naturels, et non uniquement d’incursions du loup.
- Les populations ne cherchaient pas à exterminer l’espèce. Elles visaient une régulation, intégrant les nuisances lupines comme d’autres aléas naturels.
- Le loup joue un rôle écologique positif, en régulant les populations de grands herbivores, ce qui favorise la régénération des forêts.
- L’extinction du loup n’est pas due uniquement aux politiques d’éradication. Elle résulte d’un ensemble de facteurs, dont la pression croissante de l’être humain sur les milieux naturels.
Une étude qui se prolonge en exposition
La recherche de Julie Duchêne a aussi servi à mettre en place l’exposition « Même pas peur ! Une évolution de l'image du loup à travers les siècles », élaborée par les étudiants et étudiantes de troisième année de bachelier en histoire dans le cadre du cours de Projet culturel. Une exposition qui fait notamment halte à :
- De mai à début juin 2025 : séminaire de Floreffe
- De juin à septembre 2025 : Pairi Daiza
- D’octobre 2025 à mai 2026 : Musée gaumais
A propos de Julie Duchêne
Julie Duchêne est docteure en Histoire de l’UNamur, spécialiste en histoire environnementale et en histoire appliquée (Public History). Boursière FNRS-FRESH, elle a défendu au printemps 2025 sa thèse de doctorat intitulée « Les loups, de nuisibles à invisibles. Le rôle des politiques de lutte dans la disparition des loups des territoires wallon et luxembourgeois (18e-20e siècles), menée sous la direction de la professeure Isabelle Parmentier (directrice du Pôle de l'histoire environnementale, institut ILEE).

Une nouvelle étude révèle que les anxiolytiques perturbent la migration des saumons
Une nouvelle étude révèle que les anxiolytiques perturbent la migration des saumons
Une équipe de recherche internationale dirigée par l'Université suédoise des sciences agricoles a découvert comment la pollution pharmaceutique modifie le comportement et les schémas de migration du saumon de l'Atlantique. Le professeur Eli Thoré, du Département de biologie et de l'institut de recherche ILEE de l'Université de Namur, a contribué à cette étude de terrain inédite, qui vient d'être publiée dans « Science ».

Crédit image | Jörgen Wiklund
Contrairement aux études précédentes menées en laboratoire, cette expérience à grande échelle s'est déroulée dans une rivière suédoise et a combiné une exposition pharmaceutique réaliste avec une télémétrie de pointe pour suivre le comportement de 279 saumons juvéniles (smolts) au cours de leur migration vers la mer. Les saumons ont été exposés soit à l'anxiolytique clobazam (une benzodiazépine), soit à un analgésique courant, soit aux deux, soit à aucun des deux. Les médicaments ont été administrés au moyen d'implants à libération lente, à des doses reproduisant les concentrations mesurées précédemment chez les poissons sauvages des rivières polluées.
Les chercheurs ont constaté que les saumons exposés au clobazam franchissaient les barrières migratoires de deux à huit fois plus vite que les autres groupes. Étonnamment, une proportion plus élevée - plus du double - de ces poissons a atteint la mer en vie. Mais s'agit-il d'une bonne nouvelle ?
« À première vue, il peut s'agir d'un effet positif », déclare le professeur Eli Thoré, qui a contribué à l'analyse des données, à l'interprétation et à la publication de l'étude. « Mais de tels changements de comportement peuvent entraîner des coûts cachés. En se déplaçant plus rapidement, les poissons peuvent prendre plus de risques ou utiliser l'énergie de manière moins efficace, ce qui pourrait compromettre leurs chances de survivre au voyage de retour pour frayer. Sans parler des répercussions que cela pourrait avoir sur d'autres espèces et sur l'écosystème dans son ensemble ».
Des expériences complémentaires en laboratoire ont montré que les saumons exposés au clobazam se comportaient moins socialement et ne parvenaient pas à se regrouper étroitement lorsqu'ils étaient confrontés à un brochet prédateur. La formation de bancs est une stratégie clé de lutte contre les prédateurs chez les poissons, et la perte de ce type de comportement peut accroître la vulnérabilité à l'état sauvage.

C'est la première fois que les effets comportementaux de médicaments psychiatriques sont testés à grande échelle sur des poissons migrateurs dans leur habitat naturel. Le professeur Thoré a participé au projet lors de ses recherches postdoctorales à l'Université suédoise des sciences agricoles (SLU) et reste activement impliqué dans la collaboration aujourd'hui.
« Ce projet s'inscrit dans le cadre d'un partenariat à long terme entre l'UNamur et la SLU », explique-t-il. « Nous travaillons ensemble sur plusieurs projets afin de mieux comprendre comment les polluants pharmaceutiques affectent le comportement et l'écologie des animaux sauvages, et comment nous pouvons atténuer ces effets. C'est une collaboration productive, et je la vois évoluer vers un lien structurel à long terme entre nos institutions ».
Un problème mondial avec une pertinence locale
Des résidus pharmaceutiques tels que le clobazam sont fréquemment détectés dans les rivières européennes, y compris dans les cours d'eau belges. Une étude mondiale réalisée en 2022 a révélé qu'une rivière sur quatre dans le monde contient des concentrations pharmaceutiques considérées comme dangereuses pour la vie aquatique. Les rivières de Bruxelles ont été classées parmi les 20 % les plus contaminées.
« Les médicaments comme le clobazam sont conçus pour agir sur le cerveau à faible dose, et il en va de même lorsqu'ils sont absorbés par les poissons », explique le professeur Thoré. «n Nos résultats montrent que même de très faibles concentrations, pertinentes pour l'environnement, peuvent modifier la migration et le comportement d'une espèce importante sur le plan écologique, économique et culturel, comme le saumon. »
Il ajoute : « Le saumon vit également en Belgique, notamment dans la Meuse. Dans le cadre du projet ORION, une initiative Interreg lancée il y a quelques mois seulement et réunissant des partenaires de Wallonie, de Flandre et de France, nous utilisons maintenant le saumon comme espèce sentinelle pour étudier l'influence des polluants sur la santé de la Meuse et de ses habitants. Ce que nous avons observé en Suède est tout à fait pertinent chez nous ».

Comme il l'a expliqué dans une interview accordée à De Standaard :

Cette recherche souligne la nécessité d'une réglementation appropriée des émissions pharmaceutiques et de technologies efficaces de traitement des eaux usées, et pourrait encourager le développement de médicaments plus écologiques et plus respectueux de l'environnement.
Mini-bio - Prof. Eli Thoré
Eli Thoré est professeur au Département de biologie et expert en comportement animal et en recherche sur la pollution environnementale à l'Université de Namur (Belgique), où il dirige le Laboratoire de Biodynamique Adaptative (LAB), qui fait partie de l'Unité de Recherche en Biologie Environnementale et évolutive (URBE). Il est également membre de l'Institut Life, Earth and Environment (ILEE). Son équipe adopte une approche intégrative pour comprendre comment les animaux réagissent aux changements environnementaux, en particulier ceux induits par l'activité humaine, y compris la pollution pharmaceutique. En se concentrant sur le comportement animal ainsi que sur ses mécanismes sous-jacents et ses conséquences écologiques plus larges - et en reliant ces différentes échelles - son équipe s'efforce de faire progresser les connaissances scientifiques et de contribuer à des écosystèmes prospères qui peuvent catalyser le développement durable.
Lire l'article scientifique publié dans Science: Pharmaceutical pollution influences river-to-sea migration in Atlantic salmon (Salmo salar)
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