Espace transdisciplinaire ouvert sur l’extérieur et destiné à susciter des recherches inédites, ESPHIN aborde des thématiques développées dans ses deux départements fondateurs : celui de Philosophie en Faculté de philosophie et lettres et celui de Sciences-Philosophies-Sociétés en Faculté des sciences.
En synergie avec d’autres entités, les chercheurs visent également l’émergence de nouvelles thématiques dans les grands domaines de la philosophie que sont l’anthropologie, l’éthique, l’esthétique, l’épistémologie, la logique et la métaphysique.
L'Institut ESPHIN entend promouvoir et soutenir des recherches philosophiques, tant fondamentales qu’appliquées.
Les centres de recherche
Arcadie – Anthropocène, Histoire, Utopies
Voir le contenucBUN - Centre de Bioéthique
Voir le contenucUNDP - Centre Universitaire Notre-Dame de paix
Voir le contenuESPHIN, c'est aussi...
Réfléchir
Les recherches philosophiques visent tant à étudier, de manière interdisciplinaire, des problématiques issues des sciences formelles (logique, mathématiques), humaines et de la nature, qu’à construire des problématiques proprement philosophiques dans un espace transdisciplinaire où se trouvent mobilisés les apports des différentes sciences de l’homme (politiques, sociologiques, cliniques,…).
Débattre
ESPHIN se définit aussi comme un lieu de débat, suscitant des rencontres (séminaires, colloques, conférences,…) entre les praticiens et techniciens des sciences susmentionnées et des philosophes afin de mettre en œuvre une inter- et transdisciplinarité effective, fondée sur la conjonction d’une étude approfondie des contenus scientifiques et d’une investigation philosophique de haut niveau.
Enseigner
Partant du principe qu’au sein d’une Université, l’enseignement et la recherche doivent être intimement liés, l'Institut se donne aussi comme mission de faire profiter les étudiants des Baccalauréats (de la Faculté de Philosophie et Lettres, de la Faculté des Sciences et des autres Facultés qui désireraient se joindre à ESPHIN) ou des Maîtrises (de la Faculté des Sciences) du fruit de ses activités de recherche et de leur ouvrir certaines de leurs activités.
Si l'Institut se veut en prise sur des questions « de terrain », il entend préserver avec force la spécificité des approches philosophiques fondamentales intégrant des démarches rigoureuses et exigeantes en histoire de la philosophie.
Ce contenu est en cours de migration. Nous vous invitons à consulter la page externe de l'institut de recherche.
À la une
Actualités
Le spatial, entre rêve et enjeu stratégique
Le spatial, entre rêve et enjeu stratégique
L’espace est devenu le lieu d’importants enjeux économiques et stratégiques. Membre de l’Alliance européenne UNIVERSEH, l’UNamur explore cette thématique spatiale dans ses différents départements, de la physique à la géologie, en passant par les mathématiques, l’informatique ou la philosophie. Sans oublier de s’adresser au grand public, que les étoiles font toujours rêver...
Il suffit d’une nuit à la belle étoile pour replonger dans les questionnements sans fin de l’enfance : sommes-nous seuls dans l’Univers ? Peut-on remonter le temps ? L’espace a-t-il une limite ? Et qu’y a-t-il au-delà de cette limite ? « Aujourd’hui, on sait que les étoiles autour de nous sont réparties sur un espace très grand et que nous faisons partie de la banlieue d’une galaxie parmi tant d’autres », explique Eve-Aline Dubois, mathématicienne de formation et chercheuse au Département de sciences, philosophies et sociétés de l’UNamur. « Mais c’est une prise de conscience récente, qui marque les débuts de la cosmologie comme science, datant plus ou moins des années 1920. » Parce qu’elle considère l’Univers dans son ensemble, la cosmologie opère en réalité un « énorme zoom arrière » par rapport à l’astronomie conventionnelle. « À l’échelle de la cosmologie, une galaxie est un point », résume la chercheuse.
La cosmologie, une science récente
En travaillant sur l’histoire de la cosmologie, Eve-Aline Dubois a été interpellée par le fait que de nombreuses théories relatives à l’espace étaient motivées par des positions qui n’avaient rien de scientifique, mais qui étaient plutôt d’ordre métaphysique ou philosophique. « Par exemple, Einstein était persuadé que l’Univers devait être statique, raison pour laquelle il a mis dans ses équations de quoi rendre l’Univers statique », illustre-t-elle.
Un constat qui l’a menée à s’intéresser à la notion d’infini à la fin du Moyen-âge et au début de la Renaissance. « À l’époque, l’infini était considéré comme un attribut de Dieu : c’était donc plutôt une question théologique, avant que le débat ne glisse vers des considérations davantage scientifiques et philosophiques. Et ce n’est qu’à fin du 19e et au début du 20e siècle que la notion d’infini a été correctement mathématisée. » Un infini qui peut être envisagé à la fois dans sa dimension temporelle et dans sa dimension spatiale. « Peut-on remonter à l’infini dans le passé et est-ce que l’Univers a un futur infini ? Avec le Big Bang, cette théorie tombe à l’eau puisqu’il y aurait un début... Mais aussi : est-ce que l’Univers a une frontière ou est-ce que c’est comme la surface d’une sphère qui, si on la parcourait, donnerait l’impression de ne jamais arriver au bout ? »
L’espace comme ressource
S’il intéresse la philosophie des sciences, l’espace est aussi au cœur d’enjeux économiques et géopolitiques très concrets. Grâce aux mathématiques appliquées, Jérôme Daquin, chargé de cours au Département de mathématiques de l’UNamur, cherche à mieux comprendre comment se comportent les satellites et les débris spatiaux qui se trouvent dans le voisinage de la Terre. « À terme, l’objectif est de pouvoir guider les décisions politiques ou législatives permettant de préserver l’espace, qui est de plus en plus considéré comme une ressource, au même titre que les autres ressources naturelles », explique-t-il. Aujourd’hui, l’espace n’a en effet jamais été autant peuplé de satellites, parfois envoyés en escadrons, notamment pour les besoins relatifs aux nouvelles technologies et à l’Internet à haut débit. Mais parallèlement, l’environnement spatial est encombré de plusieurs millions d'objets devenus inutiles et hors de contrôle. « Ces débris spatiaux ont différentes sources », détaille Jérôme Daquin.
« Ils peuvent provenir de lancement de fusées, de collisions, d’explosion de matériel érodé, de destruction volontaire par tirs missiles... Ils font par ailleurs courir des risques de différentes natures, soit en orbite ou au sol. Des voix de la communauté s’élèvent aussi pour alerter que, au rythme où vont les choses et sans changement majeur, on ne pourra plus accéder et utiliser cette ressource spatiale. »
Grâce à la théorie des systèmes dynamiques et au champ dit de la « complexité », Jérôme Daquin essaie donc de comprendre comment les objets spatiaux se comportent sur de grandes échelles de temps, afin de proposer des scénarios pérennes. « Ces scénarios permettent par exemple d’envisager de placer un satellite sur telle orbite dont on sait qu’elle ne se déformera pas avec le temps. » Car aujourd’hui la question des débris spatiaux est devenue centrale non seulement pour certains opérateurs privés, mais aussi pour les pouvoirs publics et en particulier pour le secteur de la défense. « L’espace a toujours été un lieu d’influence stratégique », rappelle Jérôme Daquin. « Pour les armées, en avoir une bonne connaissance est toujours très intéressant. » Aujourd’hui, il existe d’ailleurs une synergie entre les acteurs universitaires et les acteurs privés concernant la production de données relatives à l’environnement spatial. « Il y a quinze ans, ça n’existait pas, mais aujourd’hui, de plus en plus de sociétés produisent leur propre catalogage. »
Des jumeaux numériques
Si l’espace est une ressource essentielle pour le secteur des nouvelles technologies, l’informatique et l’intelligence artificielle (IA) permettent en retour de mieux comprendre les énigmes qu’il abrite encore. L’équipe de Benoît Frenay, professeur à la Faculté d’informatique de l’UNamur, collabore par exemple au projet VAMOS, qui étudie l’atmosphère de Vénus.
« Nous aidons les scientifiques à analyser les données récoltées grâce aux sondes envoyées dans l’espace, mais aussi à compléter ces données quand elles sont manquantes. » L’apport de l’IA au domaine spatial ne s’arrête d’ailleurs pas là. « Nous pouvons aussi aider les scientifiques à modéliser les phénomènes spatiaux, comme les planètes extrasolaires, les éruptions solaires », détaille Benoît Frenay.
« Cela permet de travailler non pas directement sur un système de planètes lointaines par exemple, mais sur son "jumeau numérique" qu’on aura construit à partir de données. Car si on ne peut pas envisager de modifier une étoile et ses planètes, en informatique, c’est possible ! On peut tout à fait modifier un système solaire numérique et observer par exemple ce qui se passerait si une des planètes était un peu plus grosse... Enfin, on peut aider les missions elles-mêmes, en embarquant dans la sonde des techniques IA. »
Géologue spécialisé dans l’étude des magmas à l’UNamur, Max Collinet collabore lui aussi à certaines missions spatiales. « Les magmas sont évidemment liés à la volcanologie, mais à plus grande échelle, ils informent aussi quant à la formation des roches sur terre, mais aussi sur les autres planètes. La question, c’est aussi de savoir comment ces magmas ont pu influencer la composition de l’atmosphère de ces planètes ».
En participant à analyser la composition physique et minéralogique des roches à la surface de Mars ou de Vénus, la géologie permet ainsi de mieux comprendre les conditions nécessaires à l’apparition à la vie et pourquoi, précise Max Collinet, cette vie s’est plutôt développée sur la terre, « notre planète préférée » ...
L’Alliance UNIVERSEH
Fin 2022, l'UNamur a rejoint l'Alliance européenne UNIVERSEH (European Space University for Earth and Humanity) axée sur la thématique de l’espace, avec comme objectif de relever les défis sociétaux et environnementaux relatifs à la politique spatiale européenne. Cette Alliance s’inscrit dans l’initiative des Alliances européennes lancées en 2017 par Emmanuel Macron. « Une alliance européenne, c’est un réseau d’universités qui se mettent ensemble de manière volontaire avec comme objectif de construire un campus international et faciliter ainsi le développement de parcours internationaux intégrés accessibles à différents profils d’apprenants », explique Isabella Fontana, directrice du service des relations internationales à l’UNamur. « Cela implique une grande ouverture pour les étudiants qui peuvent choisir des parcours innovants et reconnus au niveau européen, mais aussi pour les enseignants, qui peuvent collaborer dans un contexte propice aux interactions transfrontalières, transdisciplinaires et en dialogue avec les écosystèmes régionaux. »
Travailler en réseau
Les alliances peuvent être soit transversales soit thématiques, comme c’est le cas de l’alliance UNIVERSEH. « Le cas de la Belgique est assez particulier puisque toutes les universités faisaient déjà partie d’une alliance en 2022, à l’exception de l’UNamur. Il y avait donc un enjeu stratégique particulier pour notre université à intégrer à son tour une alliance », poursuit Isabella Fontana. En rejoignant les six autres partenaires de l’alliance – dont l’Université de Toulouse, leader européen dans le domaine du spatial –, l’UNamur peut désormais prétendre à de nouvelles opportunités en termes de collaborations internationales, d’enseignement et de recherche. « L’une des forces de l’UNamur par rapport au spatial, c’est le volet médiation scientifique et éducation », détaille Isabella Fontana. « Cela dit, l’objectif de l’Alliance, c’est surtout de pouvoir travailler en réseau, d’alimenter le processus de conscientisation de l’importance du réseau surtout dans le domaine de l’enseignement et plus généralement du développement économique. À l’UNamur, nous avons par exemple consacré une partie du budget à des séjours pour les membres du personnel académique et scientifique qui souhaitent développer des collaborations notamment au niveau de l’enseignement avec les universités partenaire, des collaborations qui, bien évidemment, ont le potentiel d’avoir des retombées aussi sur la recherche. »
Assemblée Générale d’UNIVERSEH à l'UNamur
Du 18 au 20 novembre, l'Université de Namur a eu l'honneur d'accueillir des scientifiques, des académiques, des étudiants et du personnel universitaire de toute l'Europe pour le « General meeting » de l'alliance UNIVERSEH.
« L’UNamur a rejoint relativement récemment l’Alliance. Organiser et accueillir l’assemblée générale était une façon de montrer et démontrer notre investissement dans ce projet. C’était aussi l’occasion de faire connaitre Namur et son écosystème », souligne Annick Castiaux, Rectrice de l’UNamur. Objectif principal de l’assemblée générale : réunir l’ensemble des partenaires et des personnes impliquées dans la réalisation du projet afin d’échanger sur les avancées et les difficultés du projet, mais également de constituer des équipes solides et solidaires et d’encourager l’esprit d’équipe. Des réunions de travail, des ateliers thématiques et moments d’échanges collectifs avaient lieu tout au long de ces trois journées.
En savoir plus sur UNIVERSEH
L’espace fait toujours rêver
Domaine complexe relevant à la fois des sciences « dures », mais aussi des sciences humaines et notamment de la philosophie des sciences, le spatial est par ailleurs très présent dans la littérature et le cinéma. Ce qui en fait une « thématique parfaite pour la vulgarisation », selon Maxime Dussong, chargé de communication et d’événements au Confluent des Savoirs, le service de vulgarisation de la recherche de l’UNamur. « Dans la culture, l’espace est partout. C’est une porte d’entrée intéressante même s’il faut aussi casser les stéréotypes. Et rappeler que le spatial, ce n’est pas que les astronautes... ». C’est notamment l’objectif du Printemps des Sciences, une initiative de la Fédération Wallonie-Bruxelles à laquelle participe activement l’UNamur. « À travers cet événement, nous rappelons que la thématique de l’espace se décline dans tous les métiers STEM (science, technology, engineering, and mathematics). À cette occasion, nous organisons aussi des visites de l’Observatoire astronomique Antoine Thomas de l’UNamur, qui rencontrent toujours un énorme succès. Elles permettent au public d’y découvrir les différents instruments utilisés, mais aussi, si la météo le permet, d’observer le ciel... »
Événement dédié, la Space week organisée à l’UNamur (la dernière édition s’est tenue en octobre 2024) permet quant à elle aux écoles et au grand public de se frotter très directement au frisson du spatial à travers la rencontre d’astronautes. « Nous avons eu la chance d’avoir encore cette année la participation de Dirk Frimout, que tout le monde connaît, même les enfants de cinquième primaire...», raconte Maxime Dussong. Cet événement propose aussi des ateliers thématiques, par exemple sur les constellations, l’occasion de « faire le lien entre légendes et sciences » et de « rappeler aux plus jeunes la distinction entre sciences et croyances », illustre Maxime Dussong.
Enfin, l’UNamur collabore à différents projets artistiques autour du spatial, comme « Stellar Scape », une exposition du Pavillon – situé sur l’Esplanade de la Citadelle de Namur – qui réunit jusqu’en janvier 2025 des œuvres conçues par des artistes et des chercheurs. « C’est un bel exemple de collaboration, qui permet aux personnes peu enclines aux thématiques scientifiques de s’y intéresser via l’art… et inversement ! ». Mentionnons encore l’existence à l’UNamur de Kap to UNIVERSEH, un kot-à-projet sur la thématique de l’espace, qui réunit des étudiants de tous horizons : scientifiques, historiens, philosophes... Une expérience transdisciplinaire et cosmique !
Cet article est tiré de la rubrique "Enjeux" du magazine Omalius #35 (Décembre 2024).
Au cœur des défis éthiques et environnementaux à Madagascar
Au cœur des défis éthiques et environnementaux à Madagascar
Situé dans l’océan Indien, Madagascar est une île au patrimoine naturel riche et à l’influence culturelle multiple. Depuis plus de 15 ans, des chercheurs de l’Université de Namur collaborent avec quelques universités et instituts malgaches sur des thématiques variées, parmi lesquelles la préservation de l’environnement, la gestion de l’eau ou encore le renforcement des capacités institutionnelles. Focus sur quelques-uns de ces projets.
Cet article est tiré de la rubrique "Far Away" du magazine Omalius de septembre 2024.
Projets éthiques et partenariats institutionnels
Professeur au Département de sciences, philosophies et sociétés, Laurent Ravez multiplie les collaborations avec Madagascar. En 2005, il a participé à un projet de recherche américain, financé par le National Institutes of Health. L’objectif ? Former des professionnels de la santé à l’éthique. « Les États-Unis avaient besoin d’établir des comités d’éthiques partout à travers le monde », explique Laurent Ravez. « Ce projet a débuté en République Démocratique du Congo avant de s’étendre à Madagascar. Lorsque je suis arrivé à Madagascar en 2009, ce fut un véritable choc culturel pour moi. Je connaissais déjà l’Afrique, mais c’est une Afrique différente, à l’intersection de diverses cultures, dont des influences asiatiques », se confie-t-il. « Sur place, nous avons travaillé avec un Institut de santé publique, puis un centre de recherche dans le domaine des maladies infectieuses. Pendant presque 15 ans, nous avons initié des groupes de chercheurs et des médecins à cette discipline. Cela a conduit à la création de nouveaux comités d’éthique et au renforcement de ceux déjà existants ».
Ce premier contact avec Madagascar a ouvert la voie à de nouveaux projets. « L’ARES-CDD m’a proposé de rejoindre un projet de recherche via appui institutionnel à l'Université d'Antananarivo », poursuit le professeur. L’appui institutionnel vise à fournir à une université les ressources nécessaires pour qu’elle puisse atteindre ses propres objectifs. « Ici, l’objectif est de renforcer les capacités et de dynamiser la recherche de l’université. Nous avons donc travaillé avec des doctoriales, qui permettent à des doctorants de présenter en quelques minutes leurs projets, de les partager avec leurs collègues, et stimuler ainsi la recherche. Notre présence permet d’apporter notre expérience et nos conseils, mais c’est un vrai partage de compétences avec les locaux », insiste Laurent Ravez.
Profondément attaché à Madagascar, Laurent Ravez s’y rend plusieurs fois par an. « C’est lors de l’un de mes voyages que l’on m’a proposé d’aller rencontrer le Père Pedro », raconte-t-il. « C’est un homme très inspirant, qui a permis à des milliers de personnes de la misère de sortir de la misère, notamment en construisant des écoles et une université gratuite. Il est convaincu que l’éducation et le travail permettent aux gens de se libérer eux-mêmes de la pauvreté ».
Encore en phase de réflexion, une nouvelle collaboration pourrait bientôt voir le jour. « J’ai enseigné la bioéthique dans le nord-ouest du pays où j’ai eu l’occasion de travailler avec une Faculté de dentisterie. La dentition à Madagascar est particulièrement préoccupante, et cela a des répercussions sur la santé des individus ou encore leur capacité de trouver du travail », expose le professeur. « Sur l’île, les dentistes sont assez mal considérés par la population, perçus comme étant méprisants. L’idée serait alors de sensibiliser ces professionnels de la santé à l’éthique, tout en développant un projet de prévention dentaire avec eux », se réjouit le chercheur.
Toxicité des microplastiques
Après un master de spécialisation en gestion des ressources aquatiques et aquaculture, Andry Rabezanahary a décroché une bourse ARES pour entamer un doctorat en 2021, sous la direction du professeur Patrick Kestemont. « À Madagascar, les systèmes de gestion des déchets sont encore en développement, ce qui peut conduire à une certaine contamination des cours d'eau », expose le doctorant.
« Notre objectif est donc d’évaluer la toxicité des microplastiques présents dans les rivières malgaches, en mesurant leur impact sur les poissons-zèbres. Nous cherchons ainsi à démontrer si des anomalies surviennent lorsque ces poissons sont exposés à des microplastiques, et nous tentons de déterminer si ces anomalies persistent ou se résorbent au cours des années suivantes ».
Pour mener cette recherche, Andry Rabezanahary partage son temps entre Madagascar, où il prélève des échantillons d'eau et de sédiments, et Namur, où il effectue les analyses. « La récolte de microplastique se fait à l’aide d'un filet à plancton, laissé dans la rivière pendant 4 à 5 heures. Nous caractérisons ensuite les microplastiques pour observer leur dégradation dans l'environnement. Les particules sont ensuite micronisées pour obtenir des tailles allant de 1 à 50 micromètres, puis sont exposées aux poissons ». Ces expérimentations visent à déterminer si les microplastiques sont capables de traverser les barrières intestinales des poissons, se répandre dans leur organisme et potentiellement provoquer des maladies.
Renforcer la gestion de l’eau
Il y a sept ans, un projet visant à appuyer la mise en œuvre de l’approche GIRE (Gestion Intégrée des Ressources en Eau) à Madagascar en vue d’un développement durable et de la résilience climatique a été lancé en collaboration entre l’UNamur, l’UClouvain, l’UAntananarivo, l’UAntsiranana et l’UToamasina. Ce projet, financé par l’ARES sous le nom de GIRE SAVA, se concentre sur la région SAVA, située au nord-est de Madagascar. Son ambition est d'examiner plusieurs aspects essentiels de la gestion de l'eau, notamment les altérations hydrologiques, la qualité de l’eau, les altérations hydrogéologiques et la mise en place d’un système d’informations dans le cadre de la gestion de l’eau.
« En tant que chercheuse du projet GIRE SAVA, je travaille principalement sur la qualité de l'eau du bassin pilote du projet : le bassin versant de l'Ankavia. J'explore comment l’anthropisation du bassin, c’est-à-dire la transformation de l’environnement par l'action des êtres humains, affecte la qualité physico-chimique de l’eau de la rivière Ankavia, mais aussi les communautés d'invertébrés et de diatomées dans l'eau. Nous essayons également d’évaluer à quelle vitesse la rivière arrive à décomposer la matière organique déversée dans l’eau en menant des expérimentations in-situ », explique Hélène Voahanginirina, doctorante.
Le travail de laboratoire a été mené à Madagascar en étroite collaboration avec une équipe à Namur, sous la direction du professeur Frederik de Laender, promoteur du projet de recherche. Camille Carpentier, experte en identification des macroinvertébrés, a joué un rôle clé dans ces analyses. La finalité de ces recherches était d'analyser la composition des macroinvertébrés sur dix sites différents, à divers moments de l'année, afin de développer un modèle prévisionnel de la diversité des communautés. Un modèle qui reposerait sur plusieurs facteurs prédictifs, tels que l'usage des terres, le type de paysage, ainsi que diverses variables physico-chimiques, comme l'acidité et la température de l'eau.
Cet article est tiré de la rubrique "Far Away" du magazine Omalius #34 (Septembre 2024).
Arcadico : un outil pédagogique et de recherche pour penser l'Anthropocène
Arcadico : un outil pédagogique et de recherche pour penser l'Anthropocène
Le Centre de recherche Arcadie propose un outil critique pour penser l'Anthropocène, cette époque géologique nouvelle dans laquelle nous serions entrés : le dictionnaire Arcadie. Utopie, catastrophe, territoire, évolution… ce dictionnaire numérique explore les notions clés de la philosophie à la lumière des enjeux écologiques, sociaux et politiques de notre temps.
Au sein de l’Institut de recherche ESPHIN (Espace philosophique de Namur), le Centre Arcadie poursuit des recherches qui interrogent trois thématiques logées au cœur de notre contemporanéité : l'anthropocène, l'histoire et les utopies. Les chercheurs et chercheuses de ce Centre ont développé l’ '"Arcadico", un dictionnaire qui vise à composer un lexique philosophique à l’heure de l'Anthropocène.
« Notre volonté avec ce dictionnaire est de montrer que la philosophie, souvent considérée à tort comme une discipline close sur elle-même, peut être un outil pertinent pour réfléchir aux défis brûlants de notre époque, tels que les bouleversements climatiques et les autres aspects de la crise écologique » expliquent Sébastien Laoureux et Louis Carré, porteurs du projet. Avec ce dictionnaire, les chercheurs et chercheuses du Centre Arcadie tentent de donner un aperçu de ce qui a été écrit dans la tradition philosophique en les reliant à des questions éminemment contemporaines. « Par exemple, la notice du terme "progrès" revient sur l’émergence de cette notion, les critiques qui lui sont adressées, le tout avec un prisme philosophique mais également sous l’angle de l’anthropocène, de l’écologie », détaillent les deux chercheurs.
Conçues pour un public averti d’étudiants, de chercheurs ou de personnes intéressées par les questions philosophiques liées à l'Anthropocène, les notices du Dictionnaire Arcadie suivent une structure en trois points :
- Une définition qui présente la notion dans une perspective philosophique.
- Une analyse des problèmes que cette notion a soulevés et soulève, tant dans la tradition philosophique que dans le contexte contemporain.
- Une proposition qui ouvre des perspectives originales sur la notion.
« Par exemple, la notice consacrée au "progrès" commence par définir cette notion comme une amélioration générale de la condition de vie des êtres humains », illustre Louis Carré. « Elle analyse ensuite les critiques qui ont été adressées à cette notion, notamment celles qui soulignent que le progrès a souvent servi de prête-nom à des formes d'exploitation des ressources naturelles et de domination sociale. Enfin, la notice propose une réflexion sur la possibilité d'un progrès qui soit compatible avec les enjeux écologiques et sociaux de l'Anthropocène. »
Cet outil pédagogique permet de découvrir ou de redécouvrir des notions clés de la philosophie dans une perspective contemporaine. Il est également un outil de recherche qui contribue à la réflexion sur les enjeux philosophiques de l'Anthropocène, cette époque qui est aujourd’hui la nôtre.
Cet outil est amené à être enrichi régulièrement avec de nouvelles notices.
Explorez déjà les notices Anthropocène, Arcadie, Catastrophe, Évolution, Progrès, Prométhéisme, Territoire et Utopie.
Un projet de recherche FNRS
L’Arcadico s’inscrit dans le cadre du PDR FNRS « Ce que l’Anthropocène fait au temps. Recherche philosophique sur les historicités et récits de la crise environnementale ». Ce projet vise à interroger la crise écologique à partir de la nouvelle expérience du temps qu’elle produit et des transformations qu’elle provoque dans notre conception philosophique de l’histoire. L’Anthropocène vient en effet bouleverser la philosophie de l’histoire qui fondait la modernité : celle d’un temps orienté vers l’avenir et structuré par un progrès nécessaire de l’humanité. Contre cette vision linéaire et déterministe du temps historique, la possibilité d’un « monde sans nous » ouverte par l’Anthropocène introduit une rupture dans la course au progrès dont il s’agit de tirer toutes les conséquences. D’une part, en proposant une analyse critique des « grands récits » de l’Anthropocène qui continuent de se construire sur une conception classique de la temporalité, aussi bien dans ses versions optimistes que dans ses versions catastrophistes : un temps continu marqué par la nécessité du cours historique. D’autre part, en prenant acte de la complexification du temps historique qui a lieu dans l’Anthropocène et que le concept de « présent épais » doit nous permettre de saisir en introduisant de la discontinuité et de la contingence dans la marche de l’histoire. Enfin, en réfléchissant à la manière dont des utopies concrètes peuvent nous aider à penser et à agir à l’heure de la crise écologique, non pas en dessinant un avenir idéal, mais en travaillant de l’intérieur le présent de l’Anthropocène et ses contradictions.
Y a-t-il encore de la place pour la paix aujourd’hui ? Une question philosophique débattue à l’UNamur
Y a-t-il encore de la place pour la paix aujourd’hui ? Une question philosophique débattue à l’UNamur
Quelles sont les conditions qui rendent encore possible la paix aujourd’hui ? Cette question était au cœur d’une journée d’étude organisée par le Centre Universitaire Notre-Dame de la Paix, en novembre dernier. Compte rendu de cette journée de réflexion par Laura Rizzerio, Professeure de philosophie à l’UNamur.
En ce 9 novembre 2023, à la veille de la commémoration de l’armistice de la Grande Guerre, le cUNdp a souhaité organiser une journée d’études pour marquer les 60e anniversaire de l’encyclique Pacem in terris, publiée en avril 1963 par le Pape Jean XXIII à la suite de crise de missiles de Cuba qui avait failli provoquer une 3e guerre mondiale nucléaire. Tout en étant obsolète à plus d’un titre, cette encyclique reste encore d’actualité car elle permet de réfléchir aux conditions qui rendent possible, encore aujourd’hui, la paix. Soulignant l’importance du dialogue et de la diplomatie, elle prend en effet position contre ceux qui pensent qu’il faut répondre par la légitime défense et la force des armes aux actes de guerre ainsi qu’à l’injustice de la terreur exprimée contre les civils innocents, en repoussant ainsi la violence par d’autres violences, convaincus que la paix ne peut advenir qu’à travers une défense armée qui arrête l’adversaire en lui prouvant sa capacité. En mettant en évidence les enjeux et les perspectives ouvertes par ce texte, les différents intervenants de la journée ont bien illustré que Pacem in terris prend un autre chemin.
Lors des interventions de la matinée, après une magnifique fresque tissée par le professeur Bruno Colson (historien, UNamur) à propos de la manière dont on a pu envisager la guerre et la paix au fil du temps, le Jésuite Christian Mellon (CERAS, Paris) a poursuivi en montrant que l’encyclique Pacem in terris, tout en dénonçant « la course aux armements, source d’un gaspillage de ressources », met en avant les piliers sur lesquels peut se fonder une paix authentique et durable : la vérité, la justice, l’amour mutuel et la liberté. En ce sens, pour le père Mellon, l’encyclique s’avère comme une véritable charte chrétienne des Droits de l’Homme, en étant l’un des premiers textes qui met en valeur la Déclaration universelle des droits de l’homme publiée en 1948.
Le troisième intervenant de la matinée, le professeur Jan De Volder (historien, KULeuven) a poursuivi la discussion en montrant à quel point la recherche de la paix constitue encore le thème majeur du pontificat du pape François qui la considère comme la seule chose juste à faire.
Dans l’après-midi, après une intervention du philosophe Giulio de Ligio (Université Catholique de l’Ouest) sur la figure de Gaston Fessard et de son travail en vue de la paix, l’intervention de la professeure Cécile Dubernet (Institut Catholique de paris), membre de la Commission Justice et paix de France et de l’association « Interventions civiles de paix », a illustré très concrètement comment les équipes non armées de l’association peuvent intervenir à la demande des organisation locales, pour apporter au cœur des conflits leurs expertise en accompagnement à la médiation, et tisser ainsi des liens entre les peuples en conflits en s’entreposant par leur simple présence non armée entre les belligérants. Ces initiatives se déploient depuis 40 ans, notamment en Amérique centrale, au Nicaragua et au Guatemala, mais aussi en Palestine, au Sud-Soudan, et elles encouragent à repenser la sécurité comme une question de liens.
La juriste Pauline Warnotte (UNamur), en dressant un magnifique tableau du Droit International et de la manière dont celui-ci pourvoit à soutenir la construction de la paix entre les peuples, a confirmé que la possibilité de tisser de liens et de les garantir par le Droit est le seul chemin pour assurer aux peuples une vie pacifique, par-delà la violence qui hante encore trop souvent le quotidien de nombreuses personnes.
Dans une interview publiée sur le site de Cathobel, Laura Rizzerio revient sur cette journée d’étude et sur la notion de paix : « La réflexion sur la paix devient de plus en plus urgente. Réfléchir sur la paix nous paraît une mission importante pour contribuer à la construction d’une société fraternelle. », estime laura Rizzerio.
Découvrez le compte rendu de cette journée dans un article d’Angélique Tasiaux publié dans Cathobel :
Le spatial, entre rêve et enjeu stratégique
Le spatial, entre rêve et enjeu stratégique
L’espace est devenu le lieu d’importants enjeux économiques et stratégiques. Membre de l’Alliance européenne UNIVERSEH, l’UNamur explore cette thématique spatiale dans ses différents départements, de la physique à la géologie, en passant par les mathématiques, l’informatique ou la philosophie. Sans oublier de s’adresser au grand public, que les étoiles font toujours rêver...
Il suffit d’une nuit à la belle étoile pour replonger dans les questionnements sans fin de l’enfance : sommes-nous seuls dans l’Univers ? Peut-on remonter le temps ? L’espace a-t-il une limite ? Et qu’y a-t-il au-delà de cette limite ? « Aujourd’hui, on sait que les étoiles autour de nous sont réparties sur un espace très grand et que nous faisons partie de la banlieue d’une galaxie parmi tant d’autres », explique Eve-Aline Dubois, mathématicienne de formation et chercheuse au Département de sciences, philosophies et sociétés de l’UNamur. « Mais c’est une prise de conscience récente, qui marque les débuts de la cosmologie comme science, datant plus ou moins des années 1920. » Parce qu’elle considère l’Univers dans son ensemble, la cosmologie opère en réalité un « énorme zoom arrière » par rapport à l’astronomie conventionnelle. « À l’échelle de la cosmologie, une galaxie est un point », résume la chercheuse.
La cosmologie, une science récente
En travaillant sur l’histoire de la cosmologie, Eve-Aline Dubois a été interpellée par le fait que de nombreuses théories relatives à l’espace étaient motivées par des positions qui n’avaient rien de scientifique, mais qui étaient plutôt d’ordre métaphysique ou philosophique. « Par exemple, Einstein était persuadé que l’Univers devait être statique, raison pour laquelle il a mis dans ses équations de quoi rendre l’Univers statique », illustre-t-elle.
Un constat qui l’a menée à s’intéresser à la notion d’infini à la fin du Moyen-âge et au début de la Renaissance. « À l’époque, l’infini était considéré comme un attribut de Dieu : c’était donc plutôt une question théologique, avant que le débat ne glisse vers des considérations davantage scientifiques et philosophiques. Et ce n’est qu’à fin du 19e et au début du 20e siècle que la notion d’infini a été correctement mathématisée. » Un infini qui peut être envisagé à la fois dans sa dimension temporelle et dans sa dimension spatiale. « Peut-on remonter à l’infini dans le passé et est-ce que l’Univers a un futur infini ? Avec le Big Bang, cette théorie tombe à l’eau puisqu’il y aurait un début... Mais aussi : est-ce que l’Univers a une frontière ou est-ce que c’est comme la surface d’une sphère qui, si on la parcourait, donnerait l’impression de ne jamais arriver au bout ? »
L’espace comme ressource
S’il intéresse la philosophie des sciences, l’espace est aussi au cœur d’enjeux économiques et géopolitiques très concrets. Grâce aux mathématiques appliquées, Jérôme Daquin, chargé de cours au Département de mathématiques de l’UNamur, cherche à mieux comprendre comment se comportent les satellites et les débris spatiaux qui se trouvent dans le voisinage de la Terre. « À terme, l’objectif est de pouvoir guider les décisions politiques ou législatives permettant de préserver l’espace, qui est de plus en plus considéré comme une ressource, au même titre que les autres ressources naturelles », explique-t-il. Aujourd’hui, l’espace n’a en effet jamais été autant peuplé de satellites, parfois envoyés en escadrons, notamment pour les besoins relatifs aux nouvelles technologies et à l’Internet à haut débit. Mais parallèlement, l’environnement spatial est encombré de plusieurs millions d'objets devenus inutiles et hors de contrôle. « Ces débris spatiaux ont différentes sources », détaille Jérôme Daquin.
« Ils peuvent provenir de lancement de fusées, de collisions, d’explosion de matériel érodé, de destruction volontaire par tirs missiles... Ils font par ailleurs courir des risques de différentes natures, soit en orbite ou au sol. Des voix de la communauté s’élèvent aussi pour alerter que, au rythme où vont les choses et sans changement majeur, on ne pourra plus accéder et utiliser cette ressource spatiale. »
Grâce à la théorie des systèmes dynamiques et au champ dit de la « complexité », Jérôme Daquin essaie donc de comprendre comment les objets spatiaux se comportent sur de grandes échelles de temps, afin de proposer des scénarios pérennes. « Ces scénarios permettent par exemple d’envisager de placer un satellite sur telle orbite dont on sait qu’elle ne se déformera pas avec le temps. » Car aujourd’hui la question des débris spatiaux est devenue centrale non seulement pour certains opérateurs privés, mais aussi pour les pouvoirs publics et en particulier pour le secteur de la défense. « L’espace a toujours été un lieu d’influence stratégique », rappelle Jérôme Daquin. « Pour les armées, en avoir une bonne connaissance est toujours très intéressant. » Aujourd’hui, il existe d’ailleurs une synergie entre les acteurs universitaires et les acteurs privés concernant la production de données relatives à l’environnement spatial. « Il y a quinze ans, ça n’existait pas, mais aujourd’hui, de plus en plus de sociétés produisent leur propre catalogage. »
Des jumeaux numériques
Si l’espace est une ressource essentielle pour le secteur des nouvelles technologies, l’informatique et l’intelligence artificielle (IA) permettent en retour de mieux comprendre les énigmes qu’il abrite encore. L’équipe de Benoît Frenay, professeur à la Faculté d’informatique de l’UNamur, collabore par exemple au projet VAMOS, qui étudie l’atmosphère de Vénus.
« Nous aidons les scientifiques à analyser les données récoltées grâce aux sondes envoyées dans l’espace, mais aussi à compléter ces données quand elles sont manquantes. » L’apport de l’IA au domaine spatial ne s’arrête d’ailleurs pas là. « Nous pouvons aussi aider les scientifiques à modéliser les phénomènes spatiaux, comme les planètes extrasolaires, les éruptions solaires », détaille Benoît Frenay.
« Cela permet de travailler non pas directement sur un système de planètes lointaines par exemple, mais sur son "jumeau numérique" qu’on aura construit à partir de données. Car si on ne peut pas envisager de modifier une étoile et ses planètes, en informatique, c’est possible ! On peut tout à fait modifier un système solaire numérique et observer par exemple ce qui se passerait si une des planètes était un peu plus grosse... Enfin, on peut aider les missions elles-mêmes, en embarquant dans la sonde des techniques IA. »
Géologue spécialisé dans l’étude des magmas à l’UNamur, Max Collinet collabore lui aussi à certaines missions spatiales. « Les magmas sont évidemment liés à la volcanologie, mais à plus grande échelle, ils informent aussi quant à la formation des roches sur terre, mais aussi sur les autres planètes. La question, c’est aussi de savoir comment ces magmas ont pu influencer la composition de l’atmosphère de ces planètes ».
En participant à analyser la composition physique et minéralogique des roches à la surface de Mars ou de Vénus, la géologie permet ainsi de mieux comprendre les conditions nécessaires à l’apparition à la vie et pourquoi, précise Max Collinet, cette vie s’est plutôt développée sur la terre, « notre planète préférée » ...
L’Alliance UNIVERSEH
Fin 2022, l'UNamur a rejoint l'Alliance européenne UNIVERSEH (European Space University for Earth and Humanity) axée sur la thématique de l’espace, avec comme objectif de relever les défis sociétaux et environnementaux relatifs à la politique spatiale européenne. Cette Alliance s’inscrit dans l’initiative des Alliances européennes lancées en 2017 par Emmanuel Macron. « Une alliance européenne, c’est un réseau d’universités qui se mettent ensemble de manière volontaire avec comme objectif de construire un campus international et faciliter ainsi le développement de parcours internationaux intégrés accessibles à différents profils d’apprenants », explique Isabella Fontana, directrice du service des relations internationales à l’UNamur. « Cela implique une grande ouverture pour les étudiants qui peuvent choisir des parcours innovants et reconnus au niveau européen, mais aussi pour les enseignants, qui peuvent collaborer dans un contexte propice aux interactions transfrontalières, transdisciplinaires et en dialogue avec les écosystèmes régionaux. »
Travailler en réseau
Les alliances peuvent être soit transversales soit thématiques, comme c’est le cas de l’alliance UNIVERSEH. « Le cas de la Belgique est assez particulier puisque toutes les universités faisaient déjà partie d’une alliance en 2022, à l’exception de l’UNamur. Il y avait donc un enjeu stratégique particulier pour notre université à intégrer à son tour une alliance », poursuit Isabella Fontana. En rejoignant les six autres partenaires de l’alliance – dont l’Université de Toulouse, leader européen dans le domaine du spatial –, l’UNamur peut désormais prétendre à de nouvelles opportunités en termes de collaborations internationales, d’enseignement et de recherche. « L’une des forces de l’UNamur par rapport au spatial, c’est le volet médiation scientifique et éducation », détaille Isabella Fontana. « Cela dit, l’objectif de l’Alliance, c’est surtout de pouvoir travailler en réseau, d’alimenter le processus de conscientisation de l’importance du réseau surtout dans le domaine de l’enseignement et plus généralement du développement économique. À l’UNamur, nous avons par exemple consacré une partie du budget à des séjours pour les membres du personnel académique et scientifique qui souhaitent développer des collaborations notamment au niveau de l’enseignement avec les universités partenaire, des collaborations qui, bien évidemment, ont le potentiel d’avoir des retombées aussi sur la recherche. »
Assemblée Générale d’UNIVERSEH à l'UNamur
Du 18 au 20 novembre, l'Université de Namur a eu l'honneur d'accueillir des scientifiques, des académiques, des étudiants et du personnel universitaire de toute l'Europe pour le « General meeting » de l'alliance UNIVERSEH.
« L’UNamur a rejoint relativement récemment l’Alliance. Organiser et accueillir l’assemblée générale était une façon de montrer et démontrer notre investissement dans ce projet. C’était aussi l’occasion de faire connaitre Namur et son écosystème », souligne Annick Castiaux, Rectrice de l’UNamur. Objectif principal de l’assemblée générale : réunir l’ensemble des partenaires et des personnes impliquées dans la réalisation du projet afin d’échanger sur les avancées et les difficultés du projet, mais également de constituer des équipes solides et solidaires et d’encourager l’esprit d’équipe. Des réunions de travail, des ateliers thématiques et moments d’échanges collectifs avaient lieu tout au long de ces trois journées.
En savoir plus sur UNIVERSEH
L’espace fait toujours rêver
Domaine complexe relevant à la fois des sciences « dures », mais aussi des sciences humaines et notamment de la philosophie des sciences, le spatial est par ailleurs très présent dans la littérature et le cinéma. Ce qui en fait une « thématique parfaite pour la vulgarisation », selon Maxime Dussong, chargé de communication et d’événements au Confluent des Savoirs, le service de vulgarisation de la recherche de l’UNamur. « Dans la culture, l’espace est partout. C’est une porte d’entrée intéressante même s’il faut aussi casser les stéréotypes. Et rappeler que le spatial, ce n’est pas que les astronautes... ». C’est notamment l’objectif du Printemps des Sciences, une initiative de la Fédération Wallonie-Bruxelles à laquelle participe activement l’UNamur. « À travers cet événement, nous rappelons que la thématique de l’espace se décline dans tous les métiers STEM (science, technology, engineering, and mathematics). À cette occasion, nous organisons aussi des visites de l’Observatoire astronomique Antoine Thomas de l’UNamur, qui rencontrent toujours un énorme succès. Elles permettent au public d’y découvrir les différents instruments utilisés, mais aussi, si la météo le permet, d’observer le ciel... »
Événement dédié, la Space week organisée à l’UNamur (la dernière édition s’est tenue en octobre 2024) permet quant à elle aux écoles et au grand public de se frotter très directement au frisson du spatial à travers la rencontre d’astronautes. « Nous avons eu la chance d’avoir encore cette année la participation de Dirk Frimout, que tout le monde connaît, même les enfants de cinquième primaire...», raconte Maxime Dussong. Cet événement propose aussi des ateliers thématiques, par exemple sur les constellations, l’occasion de « faire le lien entre légendes et sciences » et de « rappeler aux plus jeunes la distinction entre sciences et croyances », illustre Maxime Dussong.
Enfin, l’UNamur collabore à différents projets artistiques autour du spatial, comme « Stellar Scape », une exposition du Pavillon – situé sur l’Esplanade de la Citadelle de Namur – qui réunit jusqu’en janvier 2025 des œuvres conçues par des artistes et des chercheurs. « C’est un bel exemple de collaboration, qui permet aux personnes peu enclines aux thématiques scientifiques de s’y intéresser via l’art… et inversement ! ». Mentionnons encore l’existence à l’UNamur de Kap to UNIVERSEH, un kot-à-projet sur la thématique de l’espace, qui réunit des étudiants de tous horizons : scientifiques, historiens, philosophes... Une expérience transdisciplinaire et cosmique !
Cet article est tiré de la rubrique "Enjeux" du magazine Omalius #35 (Décembre 2024).
Au cœur des défis éthiques et environnementaux à Madagascar
Au cœur des défis éthiques et environnementaux à Madagascar
Situé dans l’océan Indien, Madagascar est une île au patrimoine naturel riche et à l’influence culturelle multiple. Depuis plus de 15 ans, des chercheurs de l’Université de Namur collaborent avec quelques universités et instituts malgaches sur des thématiques variées, parmi lesquelles la préservation de l’environnement, la gestion de l’eau ou encore le renforcement des capacités institutionnelles. Focus sur quelques-uns de ces projets.
Cet article est tiré de la rubrique "Far Away" du magazine Omalius de septembre 2024.
Projets éthiques et partenariats institutionnels
Professeur au Département de sciences, philosophies et sociétés, Laurent Ravez multiplie les collaborations avec Madagascar. En 2005, il a participé à un projet de recherche américain, financé par le National Institutes of Health. L’objectif ? Former des professionnels de la santé à l’éthique. « Les États-Unis avaient besoin d’établir des comités d’éthiques partout à travers le monde », explique Laurent Ravez. « Ce projet a débuté en République Démocratique du Congo avant de s’étendre à Madagascar. Lorsque je suis arrivé à Madagascar en 2009, ce fut un véritable choc culturel pour moi. Je connaissais déjà l’Afrique, mais c’est une Afrique différente, à l’intersection de diverses cultures, dont des influences asiatiques », se confie-t-il. « Sur place, nous avons travaillé avec un Institut de santé publique, puis un centre de recherche dans le domaine des maladies infectieuses. Pendant presque 15 ans, nous avons initié des groupes de chercheurs et des médecins à cette discipline. Cela a conduit à la création de nouveaux comités d’éthique et au renforcement de ceux déjà existants ».
Ce premier contact avec Madagascar a ouvert la voie à de nouveaux projets. « L’ARES-CDD m’a proposé de rejoindre un projet de recherche via appui institutionnel à l'Université d'Antananarivo », poursuit le professeur. L’appui institutionnel vise à fournir à une université les ressources nécessaires pour qu’elle puisse atteindre ses propres objectifs. « Ici, l’objectif est de renforcer les capacités et de dynamiser la recherche de l’université. Nous avons donc travaillé avec des doctoriales, qui permettent à des doctorants de présenter en quelques minutes leurs projets, de les partager avec leurs collègues, et stimuler ainsi la recherche. Notre présence permet d’apporter notre expérience et nos conseils, mais c’est un vrai partage de compétences avec les locaux », insiste Laurent Ravez.
Profondément attaché à Madagascar, Laurent Ravez s’y rend plusieurs fois par an. « C’est lors de l’un de mes voyages que l’on m’a proposé d’aller rencontrer le Père Pedro », raconte-t-il. « C’est un homme très inspirant, qui a permis à des milliers de personnes de la misère de sortir de la misère, notamment en construisant des écoles et une université gratuite. Il est convaincu que l’éducation et le travail permettent aux gens de se libérer eux-mêmes de la pauvreté ».
Encore en phase de réflexion, une nouvelle collaboration pourrait bientôt voir le jour. « J’ai enseigné la bioéthique dans le nord-ouest du pays où j’ai eu l’occasion de travailler avec une Faculté de dentisterie. La dentition à Madagascar est particulièrement préoccupante, et cela a des répercussions sur la santé des individus ou encore leur capacité de trouver du travail », expose le professeur. « Sur l’île, les dentistes sont assez mal considérés par la population, perçus comme étant méprisants. L’idée serait alors de sensibiliser ces professionnels de la santé à l’éthique, tout en développant un projet de prévention dentaire avec eux », se réjouit le chercheur.
Toxicité des microplastiques
Après un master de spécialisation en gestion des ressources aquatiques et aquaculture, Andry Rabezanahary a décroché une bourse ARES pour entamer un doctorat en 2021, sous la direction du professeur Patrick Kestemont. « À Madagascar, les systèmes de gestion des déchets sont encore en développement, ce qui peut conduire à une certaine contamination des cours d'eau », expose le doctorant.
« Notre objectif est donc d’évaluer la toxicité des microplastiques présents dans les rivières malgaches, en mesurant leur impact sur les poissons-zèbres. Nous cherchons ainsi à démontrer si des anomalies surviennent lorsque ces poissons sont exposés à des microplastiques, et nous tentons de déterminer si ces anomalies persistent ou se résorbent au cours des années suivantes ».
Pour mener cette recherche, Andry Rabezanahary partage son temps entre Madagascar, où il prélève des échantillons d'eau et de sédiments, et Namur, où il effectue les analyses. « La récolte de microplastique se fait à l’aide d'un filet à plancton, laissé dans la rivière pendant 4 à 5 heures. Nous caractérisons ensuite les microplastiques pour observer leur dégradation dans l'environnement. Les particules sont ensuite micronisées pour obtenir des tailles allant de 1 à 50 micromètres, puis sont exposées aux poissons ». Ces expérimentations visent à déterminer si les microplastiques sont capables de traverser les barrières intestinales des poissons, se répandre dans leur organisme et potentiellement provoquer des maladies.
Renforcer la gestion de l’eau
Il y a sept ans, un projet visant à appuyer la mise en œuvre de l’approche GIRE (Gestion Intégrée des Ressources en Eau) à Madagascar en vue d’un développement durable et de la résilience climatique a été lancé en collaboration entre l’UNamur, l’UClouvain, l’UAntananarivo, l’UAntsiranana et l’UToamasina. Ce projet, financé par l’ARES sous le nom de GIRE SAVA, se concentre sur la région SAVA, située au nord-est de Madagascar. Son ambition est d'examiner plusieurs aspects essentiels de la gestion de l'eau, notamment les altérations hydrologiques, la qualité de l’eau, les altérations hydrogéologiques et la mise en place d’un système d’informations dans le cadre de la gestion de l’eau.
« En tant que chercheuse du projet GIRE SAVA, je travaille principalement sur la qualité de l'eau du bassin pilote du projet : le bassin versant de l'Ankavia. J'explore comment l’anthropisation du bassin, c’est-à-dire la transformation de l’environnement par l'action des êtres humains, affecte la qualité physico-chimique de l’eau de la rivière Ankavia, mais aussi les communautés d'invertébrés et de diatomées dans l'eau. Nous essayons également d’évaluer à quelle vitesse la rivière arrive à décomposer la matière organique déversée dans l’eau en menant des expérimentations in-situ », explique Hélène Voahanginirina, doctorante.
Le travail de laboratoire a été mené à Madagascar en étroite collaboration avec une équipe à Namur, sous la direction du professeur Frederik de Laender, promoteur du projet de recherche. Camille Carpentier, experte en identification des macroinvertébrés, a joué un rôle clé dans ces analyses. La finalité de ces recherches était d'analyser la composition des macroinvertébrés sur dix sites différents, à divers moments de l'année, afin de développer un modèle prévisionnel de la diversité des communautés. Un modèle qui reposerait sur plusieurs facteurs prédictifs, tels que l'usage des terres, le type de paysage, ainsi que diverses variables physico-chimiques, comme l'acidité et la température de l'eau.
Cet article est tiré de la rubrique "Far Away" du magazine Omalius #34 (Septembre 2024).
Arcadico : un outil pédagogique et de recherche pour penser l'Anthropocène
Arcadico : un outil pédagogique et de recherche pour penser l'Anthropocène
Le Centre de recherche Arcadie propose un outil critique pour penser l'Anthropocène, cette époque géologique nouvelle dans laquelle nous serions entrés : le dictionnaire Arcadie. Utopie, catastrophe, territoire, évolution… ce dictionnaire numérique explore les notions clés de la philosophie à la lumière des enjeux écologiques, sociaux et politiques de notre temps.
Au sein de l’Institut de recherche ESPHIN (Espace philosophique de Namur), le Centre Arcadie poursuit des recherches qui interrogent trois thématiques logées au cœur de notre contemporanéité : l'anthropocène, l'histoire et les utopies. Les chercheurs et chercheuses de ce Centre ont développé l’ '"Arcadico", un dictionnaire qui vise à composer un lexique philosophique à l’heure de l'Anthropocène.
« Notre volonté avec ce dictionnaire est de montrer que la philosophie, souvent considérée à tort comme une discipline close sur elle-même, peut être un outil pertinent pour réfléchir aux défis brûlants de notre époque, tels que les bouleversements climatiques et les autres aspects de la crise écologique » expliquent Sébastien Laoureux et Louis Carré, porteurs du projet. Avec ce dictionnaire, les chercheurs et chercheuses du Centre Arcadie tentent de donner un aperçu de ce qui a été écrit dans la tradition philosophique en les reliant à des questions éminemment contemporaines. « Par exemple, la notice du terme "progrès" revient sur l’émergence de cette notion, les critiques qui lui sont adressées, le tout avec un prisme philosophique mais également sous l’angle de l’anthropocène, de l’écologie », détaillent les deux chercheurs.
Conçues pour un public averti d’étudiants, de chercheurs ou de personnes intéressées par les questions philosophiques liées à l'Anthropocène, les notices du Dictionnaire Arcadie suivent une structure en trois points :
- Une définition qui présente la notion dans une perspective philosophique.
- Une analyse des problèmes que cette notion a soulevés et soulève, tant dans la tradition philosophique que dans le contexte contemporain.
- Une proposition qui ouvre des perspectives originales sur la notion.
« Par exemple, la notice consacrée au "progrès" commence par définir cette notion comme une amélioration générale de la condition de vie des êtres humains », illustre Louis Carré. « Elle analyse ensuite les critiques qui ont été adressées à cette notion, notamment celles qui soulignent que le progrès a souvent servi de prête-nom à des formes d'exploitation des ressources naturelles et de domination sociale. Enfin, la notice propose une réflexion sur la possibilité d'un progrès qui soit compatible avec les enjeux écologiques et sociaux de l'Anthropocène. »
Cet outil pédagogique permet de découvrir ou de redécouvrir des notions clés de la philosophie dans une perspective contemporaine. Il est également un outil de recherche qui contribue à la réflexion sur les enjeux philosophiques de l'Anthropocène, cette époque qui est aujourd’hui la nôtre.
Cet outil est amené à être enrichi régulièrement avec de nouvelles notices.
Explorez déjà les notices Anthropocène, Arcadie, Catastrophe, Évolution, Progrès, Prométhéisme, Territoire et Utopie.
Un projet de recherche FNRS
L’Arcadico s’inscrit dans le cadre du PDR FNRS « Ce que l’Anthropocène fait au temps. Recherche philosophique sur les historicités et récits de la crise environnementale ». Ce projet vise à interroger la crise écologique à partir de la nouvelle expérience du temps qu’elle produit et des transformations qu’elle provoque dans notre conception philosophique de l’histoire. L’Anthropocène vient en effet bouleverser la philosophie de l’histoire qui fondait la modernité : celle d’un temps orienté vers l’avenir et structuré par un progrès nécessaire de l’humanité. Contre cette vision linéaire et déterministe du temps historique, la possibilité d’un « monde sans nous » ouverte par l’Anthropocène introduit une rupture dans la course au progrès dont il s’agit de tirer toutes les conséquences. D’une part, en proposant une analyse critique des « grands récits » de l’Anthropocène qui continuent de se construire sur une conception classique de la temporalité, aussi bien dans ses versions optimistes que dans ses versions catastrophistes : un temps continu marqué par la nécessité du cours historique. D’autre part, en prenant acte de la complexification du temps historique qui a lieu dans l’Anthropocène et que le concept de « présent épais » doit nous permettre de saisir en introduisant de la discontinuité et de la contingence dans la marche de l’histoire. Enfin, en réfléchissant à la manière dont des utopies concrètes peuvent nous aider à penser et à agir à l’heure de la crise écologique, non pas en dessinant un avenir idéal, mais en travaillant de l’intérieur le présent de l’Anthropocène et ses contradictions.
Y a-t-il encore de la place pour la paix aujourd’hui ? Une question philosophique débattue à l’UNamur
Y a-t-il encore de la place pour la paix aujourd’hui ? Une question philosophique débattue à l’UNamur
Quelles sont les conditions qui rendent encore possible la paix aujourd’hui ? Cette question était au cœur d’une journée d’étude organisée par le Centre Universitaire Notre-Dame de la Paix, en novembre dernier. Compte rendu de cette journée de réflexion par Laura Rizzerio, Professeure de philosophie à l’UNamur.
En ce 9 novembre 2023, à la veille de la commémoration de l’armistice de la Grande Guerre, le cUNdp a souhaité organiser une journée d’études pour marquer les 60e anniversaire de l’encyclique Pacem in terris, publiée en avril 1963 par le Pape Jean XXIII à la suite de crise de missiles de Cuba qui avait failli provoquer une 3e guerre mondiale nucléaire. Tout en étant obsolète à plus d’un titre, cette encyclique reste encore d’actualité car elle permet de réfléchir aux conditions qui rendent possible, encore aujourd’hui, la paix. Soulignant l’importance du dialogue et de la diplomatie, elle prend en effet position contre ceux qui pensent qu’il faut répondre par la légitime défense et la force des armes aux actes de guerre ainsi qu’à l’injustice de la terreur exprimée contre les civils innocents, en repoussant ainsi la violence par d’autres violences, convaincus que la paix ne peut advenir qu’à travers une défense armée qui arrête l’adversaire en lui prouvant sa capacité. En mettant en évidence les enjeux et les perspectives ouvertes par ce texte, les différents intervenants de la journée ont bien illustré que Pacem in terris prend un autre chemin.
Lors des interventions de la matinée, après une magnifique fresque tissée par le professeur Bruno Colson (historien, UNamur) à propos de la manière dont on a pu envisager la guerre et la paix au fil du temps, le Jésuite Christian Mellon (CERAS, Paris) a poursuivi en montrant que l’encyclique Pacem in terris, tout en dénonçant « la course aux armements, source d’un gaspillage de ressources », met en avant les piliers sur lesquels peut se fonder une paix authentique et durable : la vérité, la justice, l’amour mutuel et la liberté. En ce sens, pour le père Mellon, l’encyclique s’avère comme une véritable charte chrétienne des Droits de l’Homme, en étant l’un des premiers textes qui met en valeur la Déclaration universelle des droits de l’homme publiée en 1948.
Le troisième intervenant de la matinée, le professeur Jan De Volder (historien, KULeuven) a poursuivi la discussion en montrant à quel point la recherche de la paix constitue encore le thème majeur du pontificat du pape François qui la considère comme la seule chose juste à faire.
Dans l’après-midi, après une intervention du philosophe Giulio de Ligio (Université Catholique de l’Ouest) sur la figure de Gaston Fessard et de son travail en vue de la paix, l’intervention de la professeure Cécile Dubernet (Institut Catholique de paris), membre de la Commission Justice et paix de France et de l’association « Interventions civiles de paix », a illustré très concrètement comment les équipes non armées de l’association peuvent intervenir à la demande des organisation locales, pour apporter au cœur des conflits leurs expertise en accompagnement à la médiation, et tisser ainsi des liens entre les peuples en conflits en s’entreposant par leur simple présence non armée entre les belligérants. Ces initiatives se déploient depuis 40 ans, notamment en Amérique centrale, au Nicaragua et au Guatemala, mais aussi en Palestine, au Sud-Soudan, et elles encouragent à repenser la sécurité comme une question de liens.
La juriste Pauline Warnotte (UNamur), en dressant un magnifique tableau du Droit International et de la manière dont celui-ci pourvoit à soutenir la construction de la paix entre les peuples, a confirmé que la possibilité de tisser de liens et de les garantir par le Droit est le seul chemin pour assurer aux peuples une vie pacifique, par-delà la violence qui hante encore trop souvent le quotidien de nombreuses personnes.
Dans une interview publiée sur le site de Cathobel, Laura Rizzerio revient sur cette journée d’étude et sur la notion de paix : « La réflexion sur la paix devient de plus en plus urgente. Réfléchir sur la paix nous paraît une mission importante pour contribuer à la construction d’une société fraternelle. », estime laura Rizzerio.
Découvrez le compte rendu de cette journée dans un article d’Angélique Tasiaux publié dans Cathobel :
Événements
Chaire Notre-Dame de la Paix 2024-2025 | Soigner les personnes, le vivant, la terre
La santé en transition pour le bien commun
Le Centre Universitaire Notre-Dame de la Paix de l'Institut ESPHIN a le plaisir de vous inviter à son cycle de conférences annuel.
Jeudi 20/02/2025 | Qu’est-ce que « soigner » ? Qu’est-ce que la santé ?
Séance inaugurale de la Chaire du Centre Universitaire Notre-Dame de la Paix
Barbara Stiegler (philosophe, Université Bordeaux-Montaigne) et Gaël Giraud sj (économiste et théologien, CNRS, Docteur Honoris Causa UNamur)
Auditoire S01 - De 18h30 à 20h30
Blaise Pascal, un homme aux multiples facettes
Le Grand Séminaire Francophone de Belgique et le Centre Universitaire Notre-Dame de la Paix (cUNDP) de l'Institut ESPHIN de l’UNamur vous invitent à leur colloque scientifique.
Au programme
Lundi 24 février
- 9h30 : introduction par Laura Rizzerio (UNamur) et Joël Spronck (GSFB)
- 10h00 : biographie de Blaise Pascal par Pascal Dasseleer (GSFB)
Questions-Réponses
Pause
- 11h30 : Pascal scientifique : contributions mathématiques et physiques par Dominique Lambert (UNamur et GSFB)
Questions-Réponses
Pause de midi (possibilité de repas chaud au Séminaire)
- 14h00 : Pascal entrepreneur : un exemple pour aujourd’hui par Etienne de Roquigny (Blaise Pascal Advisors)
Questions-Réponses
Pause
- 15h30 : La pascaline par Marie Gevers (UNamur)
Questions-Réponses
Pause
- 16h45 : table ronde animée par Laura Rizzerio (UNamur)
- 18h00 : messe présidée par Mgr Luc Terlinden
Verre de l’amitié
Mardi 25 février
- 9h30 : Pascal, l’homme et l’action humaine par Christophe Rouard (GSFB)
Questions-Réponses
Pause
- 11h00 : Pascal et de Lubac par Marie-Gabrielle Lemaire (UNamur et Archives de Lubac)
Questions-Réponses
Pause de midi (possibilité de repas chaud au Séminaire)
- 14h00 : Pascal et l’actualité de l’apologétique par Christophe Cossement (GSFB)
Questions-Réponses
Pause
- 15h30 : Pascal, sa mystique et sa théologie par Jean-Michel Counet (UCLouvain))
Questions-Réponses
Pause
- 16h45 : Qu’est-ce que Pascal a à dire aujourd’hui ? La lettre du pape François par Mgr Guy Harpigny
- 18h00 : messe présidée par Mgr Guy Harpigny
Verre de l’amitié
En pratique
PAF : gratuit + éventuellement repas chaud (10€/repas à préciser lors de l’inscription à studium@seminairedenamur.be ou 081/256 466 en matinée)
Séminaires "écologie du vivant" - Aux racines de l'Humain
Séminaire organisé par ESPHIN (Espace Philosophique de Namur).
Un constat s’impose à qui est attentif aux chemins empruntés par un nombre grandissant de penseurs du 21ème siècle : ces chemins mènent aux vivants ! Qu’elle soit nommée « écophilosophie », « écoanthropologie », « écosophie », ou encore « écopolitique », cette pensée du vivant occupe une place grandissante non seulement dans les médias et les publications de toutes sortes, mais aussi dans les actions concrètes sur des terrains variés.
Programme 2024-2025 | Aux racines de l'Humain
Pour introduire le sujet
Si nous faisions le bilan de l’histoire de l’humanité, une tendance ressortirait certainement : celle d’un rapport utilitaire au non humain ne cessant de s’accentuer, et par suite celle d’un fossé se creusant entre l’humain et le reste.
L’humanité plonge pourtant ses racines dans un milieu vivant qui cultive bien d’autres relations que celles que nous privilégions actuellement et qui sont dominées par la rationalité instrumentale. Sonder ces univers relationnels oubliés sans lesquels il est de plus en plus difficile de penser l’humain est un objectif de ce séminaire qui, cette année, vous invitera à rencontrer le végétal.
Prochaine date
- Le 11 avril 2025 de 14h00 à 16h00 (intervention, discussions et moment convivial), Roland CAZALIS nous partagera son point de vue de biologiste sur le monde végétal.