L’urgence
Il devient aujourd’hui urgent d’imaginer et de mettre en œuvre un nouveau modèle de société capable de proposer une meilleure gestion des ressources et d’apporter ainsi de réponses plus adéquates aux crises auxquelles on est confronté. C’est ici que la référence au « bien commun » et aux « biens communs », qui a refait surface ces dernières décennies dans les recherches et dans les pratiques, devient intéressante. En 2009, le Prix Nobel d’économie a été attribué à Elinor Ostrom pour ses recherches à propos de la « théorie des communs »1. Il s’agit d’une théorie qui identifie les « communs » aux ressources matérielles et immatérielles d’une communauté dont la gestion résulte de la négociation de règles entre des individus. Ces derniersse conçoivent en relation les uns avec les autres et ont à cœur le collectif, communiquent non pas en vue de l’intérêt particulier, mais en vue de la bonne gestion de ces mêmes biens, en garantissant aussi leur durabilité.
Cette théorie permet d’envisager un nouveau modèle de gouvernance qui place les décisions de la communauté au centre des jeux économiques en suggérant d’autres modalités d’accès aux biens communs et à la propriété (qui ne disparaît pas pour autant) que celles imposées par le marché. Ce modèle renoue aussi avec la notion de bien commun telle qu’elle a été proposée dans l’Antiquité et au Moyen Âge (par exemple chez Aristote et Thomas d’Aquin), et qui était associée à une vision anthropologique où l’Homme est pensé comme un être « politique » qui trouve sa raison d’être dans sa capacité à s’ouvrir à autre que lui, à travers le langage et la communication par exemple.
L’ articulation entre « théorie des communs » et « bien commun » étant encore peu étudiée, la Chaire Notre-Dame de la Paix de l’UNamur a voulu mettre le focus sur le rapport qui existe entre Communs et bien(s) commun(s), en invitant à prendre la parole de spécialistes en différentsdomaines (économie, philosophie, théologie, sciences humaines, droit, sciences et technologies, aménagement du territoire). La Chaire a ainsi accueilli de nombreux professeurs et professeures, spécialistes de renommée internationale, tels l’économiste et théologien Gaël Giraud, l’économiste Benjamin Coriat, les juristes Fabienne Orsi, Serge Gutwirth, Séverine Dussoiler et Alain Strowel ; les philosophes Arnaud Macé et Cécile Renouard ; l’historien René Robaye, et l’ingénieur architecte urbaniste Bernard Declève. Leurs interventions ont permis de mieux comprendre ce que la prise en compte du bien commun peut produire, pratiquement aussi, au niveau de la conception du bien, du juste, de la propriété et de la gestion des ressources dans le respect de la liberté de chacun.
Le public, nombreux, composé d’académiques, de chercheurs, d’étudiantes et d’étudiants, de personnalités émanant de la société, a apprécié la profondeur des interventions et les réflexions que les différents intervenants ont proposées, permettant également un temps d’échange après chaque conférence. La Chaire Notre-Dame de la Paix et le centre de recherche éponyme (cUNdp) inscrivent ainsi leurs réflexions dans une démarche de service à la société en vue de contribuer à la construction d’un modèle « durable » d’organisation sociétale, respectueuse des personnes et de l’environnement.
Le cUNdp en collaboration avec d’autres chercheuses et chercheurs de l’UNamur et d’autres universités belges et étrangères projette la constitution d’un think tank pour poursuivre la réflexion et conduire à de propositions concrètes, en bénéficiant aussi de l’apport et de l’expérience des acteurs de la société qui ont déjà donné vie à des expériences de Communs.