Tout juste quatre ans après leurs deux premiers vols à bord de la Station spatiale internationale, des rotifères bdelloïdes s’apprêtent à retourner dans l’espace dans le cadre de la mission NG21 pour la réalisation d’une expérience menée par Dr Hespeels Boris & Pr Anne-Catherine Heuskin (UNamur), et le Pr Karine Van Doninck (ULB).  

Les rotifères bdelloïdes, parmi les plus petits animaux vivants sur Terre, sont connus depuis leur découverte il y a 300 ans pour leur capacité à se dessécher complètement et à revivre après réhydratation. Ces organismes pluricellulaires (composés de 1000 cellules) peuvent également résister à la congélation. Découverts dans des carottes glaciaires vieilles de 24 000 ans, certains rotifères ont même été capables de revivre et de se reproduire après avoir été décongelés.

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Démonstration du travail sur le projet RISE

Depuis 2003, Karine Van Doninck étudie ces animaux microscopiques particuliers. 

L'objectif principal de cette nouvelle mission spatiale est de fournir les premières images de rotifères réhydratés dans l'environnement unique de l'ISS, après exposition à des niveaux élevés de radiations. Les chercheurs veulent comprendre comment ces organismes se réhydratent, se déplacent et survivent tout en réparent leur ADN dans l'espace. Ils espèrent également observer si ces rotifères peuvent se reproduire dans ces conditions uniques. 

Pour réaliser cette étude, un nouveau système de culture des rotifères a été développé par le Dr B. Hespeels au sein de l’Institut of Life, Earth and Environment (ILEE) et de l’Unité de Recherche en Biologie environnementale et évolutive (URBE) en collaboration étroite avec l’ESA. « Cela permet de stocker et de réactiver les rotifères de manière autonome et sécurisée pour les astronautes. Cette innovation technique est cruciale pour le bon déroulement de l'expérience », souligne Boris Hespeels. 

Les résultats attendus de cette mission permettront de mieux comprendre les mécanismes de résistance et d'adaptation des rotifères, fournissant des informations précieuses pour les futures missions spatiales habitées vers la Lune et Mars. 

15 ans de recherche à l’UNamur : des organismes ultra-résistants et fascinants

Depuis plus de 15 ans, ces organismes sont étudiés à l’Université de Namur par l’équipe du Pr Karine Van Doninck pour leurs caractéristiques de résistance extrêmes. En collaboration avec le département de physique (LARN, Pr Anne-Catherine Heuskin), les chercheurs ont mené de nombreuses études démontrant la capacité des rotifères à survivre à des dommages massifs de l’ADN suite à des expositions à des radiations plus de 100 fois supérieures à ce qu’une cellule humaine peut supporter. Malgré ces dommages, les rotifères bdelloïdes montrent une remarquable capacité à réparer leur ADN. Ces organismes sont donc de véritables modèles biologiques pour mieux comprendre les mécanismes de résistance aux radiations, à la dessiccation, ainsi qu’au vieillissement et à l’adaptation à des environnements extrêmes. Récemment, des recherches au sein du projet ERC de Pr. Karine Van Doninck, collaboration entre ULB et l’UNamur, ont mis en évidence la présence de protéines pouvant conférer une radiorésistance à des cellules humaines. De nombreuses investigations sont également en cours pour caractériser les nombreux antioxydants découverts chez ces organismes, qui pourraient être la clé de leur résistance et adaptation. Enfin, constitués uniquement de femelles se reproduisant sans mâles depuis plus de 60 millions d’années, les rotifères bdelloïdes sont étudiés de près pour comprendre comment ces animaux microscopiques peuvent évoluer et s’adapter en l’absence de reproduction sexuée. 

Comprendre l’adaptation des organismes vivants dans un milieu hostile

Ces dernières années ont été marquées par un regain d’intérêt pour les vols spatiaux habités, en particulier vers la Lune et, à terme, vers Mars. Ces aventures fascinent, mais constituent un défi pour les astronautes d’aujourd’hui et de demain. En effet, de nombreux défis les attendent : taux élevé de radiation pouvant induire des cancers, microgravité impactant les processus physiologiques, vie dans un espace confiné, défis psychologiques de l’éloignement de la Terre, etc. L’espace n’est pas un milieu propice à l’Homme. Afin de préparer des vols vers des destinations lointaines, il est crucial de mieux comprendre comment les organismes vivants peuvent s’adapter dans cet environnement si particulier. Les rotifères, avec leurs multiples caractéristiques de résistance, ont été précédemment sélectionnés par l’Agence spatiale européenne (ESA) comme organisme d’intérêt pour investiguer ces questions. 

En 2019, une première expérience a permis d’étudier l’impact d’un vol à bord de la Station spatiale internationale (ISS) sur l’expression des gènes des rotifères bdelloïdes Adineta vaga. Les résultats, qui démontrent la modification de certains gènes clés dans la réparation de l’ADN et la résistance aux radiations ionisantes, seront bientôt publiés. Une deuxième expérience, lancée en 2020, s’est focalisée sur la capacité des rotifères à se réhydrater et à réparer leur ADN dans l’environnement de l’ISS. Les résultats en cours d’analyse confirment la capacité unique de ces organismes à réparer leur ADN dans cet environnement particulier. 

Rencontre entre science et art : l’œuvre Ēngines of Ēternity à bord, née d’une collaboration entre l’ULB et SEADS

Le collectif artistique SEADS est ravi d'annoncer la prochaine itération de son œuvre Ēngines of Ēternity, qui accompagnera l'expérience RoB2.1 à bord de la Station spatiale internationale (ISS). Cette œuvre unique se compose de trois impressions miniatures haute résolution, fruit d'une collaboration entre le laboratoire du Pr Karine Van Doninck (Unité de recherche de biologie moléculaire et évolution, Faculté des Sciences, ULB) et SEADS. 

Ēngines of Ēternity a déjà voyagé vers l'ISS avec les deux autres missions de Rotifer in Space. À chaque fois, à leur retour sur Terre, les données des expériences sur les rotifères sont utilisées pour faire évoluer algorithmiquement l'œuvre d'art. Ēngines of Ēternity est donc une co-création transdisciplinaire entre artistes, rotifères, environnement spatial et algorithmes. 
Ce projet innovant a été présenté à Bruxelles, Londres, Dresde et à l'Agence spatiale européenne à Noordwijk. Fin juillet, il sera présenté dans le cadre de l'exposition "Exploring Exoplanets" à Copenhague. En savoir plus : https://seads.network/project/engines-of-eternity 

 L’UNamur au cœur de l’espace avec l’alliance UNIVERSEH

L’UNamur fait partie de l’Alliance européenne European Space University for Earth and Humanity (UNIVERSEH) axée sur la thématique de l’espace.  Elle s’inscrit dans le cadre de l’initiative «Universités européennes», promue par la Commission européenne. Elle ambitionne de développer un espace pour relever les défis sociétaux, sociaux et environnementaux découlant de la politique spatiale européenne. 

Partenaires du projet RISE

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