Jérôme André : Je suis responsable du service conservation des œuvres. Notre collection, qui augmente d’année en année, a été initiée avant que le musée existe, par son fondateur Laurent Busine. Dès le début, sa politique d’acquisition et sa volonté de soutenir les artistes contemporains étaient ambitieuses. Son idée était de constituer une collection tournée vers l’extérieur, notamment vers l’international, et inspirée par le lieu où elle allait être installée.
Beaucoup d’œuvres ont été commandées et produites dans le contexte de l’ancien site industriel. C’est par exemple le cas de notre première commande, l’œuvre « Les Registres du Grand-Hornu » de Christian Boltanski, artiste français de renommée internationale. Il s’agit d’une immense installation, comme un mausolée à la mémoire des travailleurs du Borinage, composé de boîtes, d’archives, de photos et de noms. Cette œuvre tisse le lien entre l’artiste, dont les préoccupations sont externes au Grand-Hornu, et les gens de la région, dont les attentes, concernent la mémoire, la transformation progressive du site en lieu d’art et à sa valorisation. Beaucoup d’artistes ont travaillé dans le même sens et ont souligné le caractère particulier et inspirant du Grand-Hornu. À côté des commandes, on achète également des œuvres contemporaines.
En tant que conservateur, mon rôle est d’établir l’inventaire de la collection et les scénarios de vieillissement des œuvres. Comme elles sont plurielles, cela part dans toutes les directions. On conserve aussi bien des plantes, des fossiles, que de la photographie, de la plasticine, de la vidéo et du numérique. On est autant pris par les questions d’obsolescence matérielle, qu’immatérielle. L’art conceptuel demande un travail de conservation différent. Il faut interviewer les artistes, écrire des scénarios pour pouvoir rejouer l’œuvre, réaliser des vidéos… On s’est souvent penchés sur ces questions en collaboration avec des étudiants dans le cadre de leur mémoire.
Un autre aspect de ma fonction concerne la valorisation de la collection, qu’on n’expose pas en permanence ici. On l’a donc intégrée dans des catalogues plus larges qu’ils soient français, européens ou wallons. On gère les œuvres qui sortent et celles qui rentrent. On les accompagne aussi pour qu’elles soient présentées dans les meilleures conditions. Cela demande beaucoup de déplacements.